
En 2005 Nicolas Renahy a montré que les changements socio-économiques des dernières décennies, loin de ne concerner que les zones urbaines, ont aussi bouleversé le monde rural, ses classes populaires et en particulier sa jeunesse ouvrière. Retour sur l’enquête et sur ses principaux résultats.
Nicolas Renahy : Tout un ensemble de faits et de hasards ont en réalité permis qu’un travail d’enquête, démarré comme étudiant en anthropologie sociale et ethnologie, a pu se poursuivre pendant dix années, de 1993 à 2003 environ, dans ce même village de Foulange en Bourgogne à côté duquel j’ai grandi. Cette enquête s’inscrivait pleinement dans la conception d’une sociologie de terrain que m’enseignait Michel Pialoux, une sociologie qui ne se cède rien théoriquement mais se pense de manière incarnée, en grande partie hors du laboratoire et du bureau. L’observation participante y prenait une place centrale. Il s’agissait alors d’entrer dans le monde des jeunes adultes de Foulange, une jeunesse rurale dont l’enfance avait été profondément marquée par l’expérience parentale de la précarité puisque l’usine, principal pourvoyeur d’emplois, avait brutalement fermé en 1981 et mis 70 % de la population active du village au chômage. Dans l’ensemble du canton, cet événement a eu des conséquences très importantes. (...)