Bandeau
mcInform@ctions
Travail de fourmi, effet papillon...
Descriptif du site
l’Humanité
Les Jeannette se sont fait dévorer !
Article mis en ligne le 5 août 2014
dernière modification le 1er août 2014

Pillage de trésorerie, locaux et outils de travail jamais modernisés… Plusieurs scandales expliquent la fermeture de la biscuiterie normande.

Caen (Calvados), envoyée spéciale Pour produire leurs célèbres madeleines, longtemps ils se sont levés de bonne heure, les salariés de la Biscuiterie Jeannette de Caen en région Basse-Normandie. L’usine a été fermée par le fonds d’investissement LGC en décembre 2013, ils ont été licenciés en février 2014, mais ne se couchent pas pour autant. Une vingtaine d’entre eux, espérant trouver un repreneur, se relaient depuis cet hiver, jour et nuit, pour garder un œil sur l’outil de travail, «  leurs machines  ». Pas question de laisser vendre ce «  butin  » aux enchères. Ils ont entretenu le matériel. Ils ont fait tourner les pétrins et les fours pour vendre leur production sur les marchés et devant l’usine dans le cadre de la lutte menée sous la houlette de l’union locale CGT.

Mais, lorsque nous avons rencontré trois d’entre eux, quinquagénaires, lundi à Caen, c’est l’écœurement qui dominait. Il faut dire que l’audience au tribunal de commerce, qui s’était tenue la veille, augurait un avenir au goût amer. «  Le procureur général nous a dit qu’une fois que la cession des actifs (locaux, outillage, marque… – NDLR) sera prononcée, nous devrons nous tenir sages, sinon nous serons évacués par la force publique !  », se révolte Marie-Claire, ex-salariée, licenciée. «  De mémoire, notre avocate n’avait jamais entendu pareil discours de la part d’une cour de justice.  » Après quarante ans de labeur, elle gagnait 1 300 euros par mois.

Pillage des savoirs et spéculation 
sont les nœuds du problème

À écouter Éric, entré à seize ans dans la boîte et lui aussi licencié après trente-sept ans et demi passés dans les ambiances de farines qui vous collent aux bronches, on se dit que le pillage et la spéculation sont les nœuds du problème de cette unité industrielle créée en 1850, où même sous les bombardements, ô combien violents en Normandie en 1944, les biscuits Jeannette sortaient des fours. «  Les différentes directions qui se sont succédé ici n’ont jamais eu à cœur de moderniser l’outil industriel, d’adapter les locaux aux normes en vigueur. Le dernier patron en date est parti et les administratifs ont suivi, il n’y a que les salariés de la production qui sont entrés en lutte  », explique Éric, en soupirant devant des machines datant des années 1970. L’homme, des sanglots dans la voix, se remémore l’époque où la marque est tombée entre les mains de Papy Brossard, dans les années 1980. (...)

APRÈS UN RACHAT PAR PAPY BROSSARD DÉSASTREUX, LECLERC, DIA, SUPER U... N’ONT PLUS COMMANDÉ À L’ENTREPRISE QUE DES MADELEINES BAS DE GAMME, PRODUITES À PERTE ! (...)