Bandeau
mcInform@ctions
Travail de fourmi, effet papillon...
Descriptif du site
Acrimed
Les leçons de bonheur du Parisien
Article mis en ligne le 19 février 2016

Non content d’informer chaque jour ses lecteurs sur la marche du monde, voici que Le Parisien se préoccupe de leur bonheur. Rien de moins. « Être heureux, ça s’apprend », tel est le titre engageant qui s’étale sur les pages 12 et 13 du Parisien du 26 janvier 2016. Les lectrices et lecteurs du quotidien vont apprendre, au fil d’articles, interviews et témoignages divers, qu’ils ont le bonheur « à portée de main » : il suffit de se contenter de ce qu’on a. Une nouvelle leçon de résignation, cette fois emballée dans des recettes de cuisine psychologique.

(...) L’auteur, Donat Vidal Revel, attaque très fort, sur un mode shakespearien : « Être heureux ou ne pas être heureux ? Telle est la question fondamentale qui se pose à nous puisque celle de notre existence est déjà tranchée. Il nous revient donc de s’emparer de la vie. » Un peu rapide, mais logique et ambitieux. Comment s’emparer de la vie ? Première déception : il suffirait d’« arriver à faire le tri entre les êtres généreux et les personnes toxiques ». Dit ainsi, ce ne devrait pas être trop difficile, si ce n’est déjà fait. Puis, encore plus modeste : « arriver à s’astreindre à une petite discipline du bonheur par des gestes simples, par un état d’esprit sans cesse revigoré par des pensées tournées vers les autres ». Difficile de faire moins ! Alors, c’était cela « s’emparer de la vie » ? On se sent un peu trompé sur la marchandise.

Et ce n’est pas fini. En conclusion, l’auteur nous livre le conseil d’un philosophe anonyme : « Désire tout ce que tu as et tu as tout ce que tu désires ». Sagesse des nations, peu coûteuse et encore moins dérangeante : que le chômeur désire son chômage, le salarié son salaire de misère Bernard Arnault Le Parisien [1], et les vaches seront bien gardées. Sous couvert d’une invitation au bonheur, Le Parisien nous invite ainsi à nous réjouir du monde tel qu’il est. Ce que confirme le philosophe écrivain Alexandre Jollien, interviewé dans ce dossier, quand il déclare que « le bonheur[…] c’est accepter l’imperfection du monde tel qu’il est… et l’aimer ». (...)

Déjà en 2012, sous le titre « Dites non à la crise », le quotidien suggérait à ses lecteurs des comportements « optimistes » qui, à l’analyse, se révèlaient être des formes variées de résignation. (...)