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Maçon, infirmière, travailleur chez Amazon… : ils s’opposent à la réforme des retraites
#retraites #inégalités
Article mis en ligne le 10 janvier 2023

Maçon, travailleur chez Amazon ou infirmier, ils sont âgés de 22 ans à 60 ans et exercent des métiers pénibles, voire "usants". Alors que le gouvernement prévoit un décalage progressif de l’âge de départ à la retraite à 64 ans, ils expliquent pourquoi ils sont contre cette réforme, qui devrait être présentée par la Première ministre Élisabeth Borne mardi 10 janvier. 

Dominique, 59 ans, agent de maîtrise dans la grande distribution en Haute-Vienne

Cela fait trente ans que je suis dans la grande distribution. J’ai déjà été opéré aux deux épaules, pour soigner des tendinites dues aux mouvements répétitifs et aux charges lourdes que je transporte tout au long de la journée. Chaque jour, je porte environ 600 kilos de marchandise en tout. Je dois aussi me faire opérer des deux mains, pour recevoir des prothèses de pouces : à force d’arracher et de déchirer des cartons pour les mises en rayon, je n’ai plus d’articulation. Alors, si on me dit que ma retraite est repoussée, de quelques mois ou d’un an, je ne pourrai pas l’accepter. Plus on avance en âge, et plus on voit que le rythme de travail est dur à tenir. Il est bien plus difficile qu’il y a vingt ans de porter des charges, même mes genoux commencent à flancher.

Beaucoup de jeunes cherchent du travail, et je pense qu’il faudrait les former pour libérer les gens et leur permettre de prendre leur retraite à 62 ans. Je n’ai jamais fait grève ni manifesté de ma vie. Mais si on me le demande, je le ferai, parce que, là, on arrive à une limite qui est difficilement acceptable. À force de trop en demander aux gens, la corde risque de rompre, que ce soit physiquement ou psychiquement. (...)

Jean, 29 ans, maçon à Valence 

Arriver à 60 ans en bonne santé, quand tu es maçon, c’est déjà compliqué, même avec des postes aménagés. Toute la journée, on avale de l’huile, de la graisse, du ciment, de la poussière, tout ce qui peut exister dans le bâtiment. On utilise le marteau tout le temps, le corps ramasse. Beaucoup de mes collègues finissent avec des cancers généralisés à 60 ans. Et même si tu y échappes, à partir de 50 ans, tu as les genoux en vrac, ou le dos, le canal carpien, les ligaments…

Certains de mes collègues sont brisés, ils marchent en canard. Il faut les aider tout le temps, ils ne peuvent plus travailler normalement, ils sont foutus. Alors s’il faut continuer jusqu’à 64 ans… (...)

Joanna, 45 ans, infirmière en psychiatrie à Lurs 

Je ne compte pas sur ma retraite, c’est impossible pour moi, de rester 22 ans encore comme infirmière. Quand j’ai commencé, on pouvait partir à 55 ans quand on avait trois enfants, ou sinon à 57 ans, mais cela a changé depuis longtemps. 

Infirmier en psychiatrie, c’est un travail pénible. C’est une charge mentale lourde. Concrètement, tu ingurgites tout le malheur du monde, tu absorbes des histoires très dures durant les entretiens. J’ai fait un burn-out l’année dernière. J’ai une famille de quatre enfants... Je n’ai plus envie de me vouer uniquement à mon travail. Mon grand-père me disait : "Il ne faut pas perdre sa vie à la gagner". (...)