
Jean-Luc Mélenchon portait des idées rouges. Le revoici avec un discours très vert. Après les « morts » successives du communisme d’Etat et de la social-démocratie, il propose de refonder la doctrine socialiste dans l’écologie politique. Le résultat est baptisé « écosocialisme » et des assises lui seront consacrées samedi 1er décembre.
Cet « écosocialisme » est une tentative de modernisation idéologique. C’est aussi un pari stratégique, qui devrait, Mélenchon l’espère, lui permettre de rallier derrière lui une grande partie du mouvement écologiste et constituer « une majorité alternative à gauche ».
Convaincu que la crise joue en sa faveur, le coprésident du Parti de Gauche annonce le « blocage » du pays. Et fait une offre de services à François Hollande : « Je suis prêt à être Premier ministre. » (...)
Les deux grands modèles d’organisation de la pensée et de l’action socialiste se sont effondrés. Le premier, le communisme d’Etat, avec un fracas dont on entend encore l’écho. Le second, la social-démocratie, beaucoup plus suavement, si bien que beaucoup de gens croient que ce n’est toujours pas fini. Pour faire de la social-démocratie, il faut un lien organique entre le parti et le syndicat et construire l’Etat social. Or aucun des partis dits sociaux-démocrates de l’Europe du Nord n’a plus de lien privilégié avec les syndicats. Et non seulement ils ne construisent pas l’Etat social mais ils le détruisent. La capitulation devant la finance de Papandréou en Grèce a terminé le cycle social-démocrate.
Cette machine-là est morte, c’est un astre mort, une configuration électorale qui tient par la peinture et les oripeaux qui vont avec mais qui n’a plus de contenu ni subversif ni émancipateur. (...)
L’écosocialisme n’est rien d’autre que la doctrine du mouvement socialiste refondée dans le paradigme de l’écologie politique.
La grande différence avec le passé, c’est qu’on va s’intéresser au contenu : ce qu’on produit, pourquoi on le produit, comment on le produit.
Comment prend-on ces décisions ?
Avec la « règle verte ». Une règle toute simple : ne jamais s’avancer dans la voie où on dépense plus que ce qui peut se reconstituer. Une dette souveraine ou privée sont de simples jeux d’écriture. La dette écologique, elle, a une réalité objective. (...)
Comment veut-on être pour l’émancipation de l’humanité et considérer, entre autres fadaises des sociaux-libéraux :
– que le changement climatique n’est pas le sujet majeur ;
– que le nucléaire, on verra une autre fois ;
– que les modes de production et de consommation, tout ça est bien dommage mais c’est la liberté individuelle ;
– sans oublier la politique de l’offre désormais défendue par le chef de l’Etat. (...)
Pour moi la principale source d’enseignement de l’Amérique latine, c’est la gestion de la conflictualité et son utilisation comme méthode de gouvernement dans un cadre démocratique.
Mais sur le plan écologique, ça n’a pas été un lieu de grandes révélations. Ou plutôt : j’ai vu qu’il peut en coûter très cher de ne pas avoir pris le temps de mener une réflexion écolo assez approfondie.
On a un exemple d’immaturité écologique au Venezuela : ça m’ennuie de le dire mais c’est la vérité. En Bolivie, on est plus dans les rapports de force, c’est toute l’histoire de la Pachamama, à laquelle je n’adhère pas du tout. Quant aux Argentins, ils me font l’effet, comme les Uruguayens, dans le meilleurs des cas, d’être indifférents.
C’est certainement les Equatoriens qui ont été le plus loin dans une vision militante de l’écologie politique. Ils ont quand même inventé le dossier Yasuni ITT – cette volonté de ne pas exploiter de pétrole et demander une partie de la valeur de ce pétrole à la communauté internationale comme contribution à la non-émission de gaz à effet de serre.
C’est une idée que je trouve plus performante que les droits à polluer, une escroquerie qui n’a produit qu’une seule chose : un marché de spéculation et plusieurs désastres industriels. C’est la fumée du prétendu capitalisme vert. Or le capitalisme ne peut pas être vert. Jamais. (...)
On ne va pas attendre 2017 en disant aux gens : « Entre-temps, vous pouvez crever. » Donc il faut se battre tous les jours pour ouvrir le chemin à une alternative.
Il y a une majorité de gauche à l’Assemblée : je propose qu’elle change de centre de gravité. Je suis prêt à être Premier ministre, mais je peux aussi imaginer de ne pas l’être. Qu’une coalition se fasse avec des socialistes, des écologistes et des élus du Front de Gauche, sur une ligne de rupture évidemment avec la logique capitaliste et productiviste. C’est possible. A nous de faire la démonstration que nous sommes des partenaires fiables, idéologiquement stables, non dogmatiques.
La droite du mouvement socialiste ne peut quand même pas prétendre prendre tout le monde en otage avec un révolver sur la tempe, sur le thème : « Celui qui n’est pas d’accord avec ce que dit M. Ayrault se prépare à donner le pouvoir au Front national. » (...)