
Cette Lettre ouverte a été discutée lundi 18 novembre au Lycée Loritz entre collègues. Nous n’avons pas pu réagir plus tôt, puisque nous n’avons pas été informés de la visite de Jean-Michel Blanquer par notre direction. Nous y exposons les points majeurs de notre opposition au tout-numérique.
Monsieur le Ministre,
Vous étiez ce lundi 18 novembre présent au lycée Loritz ; cette visite était centrée sur les usages du numérique, visite dont la majeure partie des enseignants et personnels d’éducation n’a eu connaissance que samedi 16 novembre par la presse, voire ce lundi 18 novembre au matin à leur arrivée au lycée, alors que certains élèves en avaient été informés dès jeudi [1]. Nous aurions aimé être conviés à échanger avec vous, mais la table ronde destinée à ces échanges était apparemment réservée à certains enseignants et personnels d’éducation seulement. Aussi, voudrions-nous vous faire connaître les raisons de notre opposition au lycée 4.0 initié par la Région Grand Est.
Outre les problèmes techniques récurrents de ce dispositif ; outre les problèmes de santé, qu’ils soient d’ordre ophtalmologiques, en raison de l’usage intensif des écrans, problèmes pouvant mener à des formes de cécité, ou qu’ils soient liés à l’exposition aux ondes électromagnétiques générés par le Wifi de 35 élèves connectés en même temps (maux de tête, acouphènes) ; outre les effets écologiques désastreux du passage au tout numérique [2] (surconsommation d’électricité, pillage des ressources minières provenant de pays dit en voie de développement) ; outre la question morale et économique que pose le fait d’utiliser des outils issus des géants du numérique et en particulier de Microsoft et de Google (entreprises dont on sait qu’elles pratiquent l’évasion fiscale), alors que des alternatives gratuites existent ; nous considérons que le tout numérique est un non sens pédagogique.
D’une part, apprendre demande de l’attention ; or les écrans absorbent cette attention, entraînant bien souvent une réceptivité passive contraire à tout apprentissage. (...)
D’autre part, ces mêmes écrans tendent à faire des élèves des individus enfermés sur eux-mêmes, sans véritable lien social, si ce n’est par l’intermédiaire de ces réseaux, qui bien qu’appelés « sociaux » ne le sont absolument pas. Alors même que l’usage des écrans est devenu quasi permanent hors du temps scolaire, il nous paraît particulièrement peu souhaitable, d’introduire massivement ces mêmes écrans dans l’enceinte scolaire. (...)
Il est bon de noter à ce sujet, que la réforme du lycée en faisant disparaître la classe au profit de groupes recomposables selon les spécialités et options ne peut qu’accentuer cette perte du sens social chez les élèves.