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Rue 89
Non, notre cousine thaïlandaise ne venait pas se prostituer en France
Article mis en ligne le 11 octobre 2012
dernière modification le 8 octobre 2012

J’habite en Thaïlande. L’été dernier, j’ai décidé d’emmener ma femme et mon fils de deux ans en vacances en France. J’ai aussi invité un couple d’amis quinquagénaire, Martin et Hélène. Ma femme voulait aussi emmener sa cousine, Nangnoy, 21 ans, qui est étudiante dans une université locale et qui vient souvent nous voir à la maison.

(...) Je suis avocat, je sais bien que le « droit au visa » n’existe pas. Alors pourquoi suis-je en train de me plaindre ? Parce qu’il est question ici du non respect des droits procéduraux. Par exemple, le droit d’être traité de manière juste, ce qui implique le droit d’être entendu et d’entendre les raisons qui motivent une décision. Il n’y a pas de « droit au visa », mais ça ne veut pas dire qu’il n’existe pas de droits du tout.

Et c’est d’ailleurs la loi qui le dit dans l’Europe de Schengen. D’après le nouveau code des visas de 2009, les demandeurs de visa jouissent de manière extensive des droits procéduraux. Un guide pratique [en anglais] pour les demandeurs de visas a même été édité par la commission européenne. Ce guide, qui suit les recommandations du code des visas, est catégorique :

« Les droits fondamentaux, inscrits dans la Charte de l’Union Européenne, doivent être garantis à tous les demandeurs de visas. »

On ne peut être plus clair. Parmi ces droits fondamentaux, on retrouve « le droit à une bonne administration ». C’est l’article 41 de la Charte qui stipule que « toute personne a le droit d’être entendue avant qu’une mesure individuelle qui l’affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre ».

Alors, Monsieur le consul, vous pouvez soupçonner que Nangnoy utilise un séjour familial comme prétexte pour venir travailler en France. Mais vous ne pouvez pas pré-supposer qu’elle est une prostituée. C’est la loi. Avant de la priver d’un séjour en France, une expérience qui ne se représentera certainement pas dans sa vie, vous devez lui donner la chance d’expliquer qu’elle est un voyageur « bona fide ». Oui, ça aurait certainement requis plus de temps pour un entretien. (...)

Rien que l’année dernière, d’après les statistiques de l’Union Européenne, près de 750 000 personnes [fichier Excel] ont vu leur demande de visa touristique refusée. Les consulats des pays de l’Union Européenne ne remboursent pas les frais de visa si la demande est rejetée.

Chaque demande coûte 60 euros, cela fait donc près de 44 million d’euros dans les caisses des ambassades. 44 millions d’euros et personne ne pose de questions. Ces refus étaient-ils justifiés ? Arbitraires ? Impossible de le savoir. Les consulats de l’Union Européenne n’ont pas de comptes à rendre. (...)