
Une enquête a été menée pendant des mois au centre de rétention administrative de Metz. Elle visait une brigade de nuit de la Police aux frontières (Paf) : au lieu de monter la garde, des agents s’adonnaient à l’alcool et au karaoké.
Le site du service public annonce sobrement que la rétention administrative permet de maintenir dans un lieu fermé un étranger qui fait l’objet d’une décision d’éloignement. Ce lieu peut être un Centre de rétention administrative (CRA). Sur la page de celui de Metz, on pourrait ajouter, dans la liste des activités, celle d’organisation de soirées festives et de soirées karaoké. Ces dérives, découvertes par les autorités à la fin de l’année 2017, ont fait scandale jusqu’au plus haut sommet de la hiérarchie policière.
Une lettre a servi de déclencheur à une enquête. Le courrier, envoyé au cabinet du ministre de l’Intérieur, évoque « des problèmes graves au centre de rétention de Metz. La hiérarchie, en partie fortement alcoolisée, fait subir un harcèlement moral aux jeunes recrues. » L’auteur assure que « le mot “suicide” a été prononcé ». C’est signé « une maman inquiète ». Lorsqu’il a reçu ces premières informations et d’autres les confortant, le directeur zonal de la Police aux frontières, Christian Lajarrige, a « saisi l’Inspection générale de la police nationale (IGPN) ». L’enquête administrative n’a pas démontré de harcèlement mais révèle des habitudes de travail particulières au sein de cette unité de nuit. (...)
Ce comportement « inadmissible et inacceptable », selon le directeur, aurait démarré très rapidement après l’arrivée d’un nouveau chef de brigade, en 2016. L’homme débarquait des CRS et a transféré ses soucis d’ivresse d’une direction à l’autre.
Sept hommes poursuivis
Des membres de l’équipe ont pourtant alerté la direction du centre de rétention. Dès 2016, un agent a dénoncé les absences injustifiées de son supérieur. « Des alertes qui n’ont pas été prises en compte » par les deux officiers à la tête du CRA, écrit l’IGPN. Si bien que le scandale est resté longtemps confiné.
L’enquête menée en 2018 a abouti au renvoi de sept policiers – certains ne sont plus dans l’unité – devant le conseil de discipline pour divers manquements et fautes déontologiques. Les premiers avis ont été émis jeudi. (...)
la directrice de l’IGPN résume l’affaire à sa façon : « Cette affaire est incroyable. Il y a tout, au CRA de Metz : des agents qui ne font pas leur travail, une hiérarchie absente, des moments de convivialité qui tournent à l’alcoolisme récurrent, des dérives inacceptables. Les officiers ne contrôlent rien et l’omertà règne. Les sanctions doivent être réelles. » (...)