
Plus de 65 ans après l’installation des usines Renault au cœur des Mureaux, dans les Yvelines, que sont devenus les fils d’ouvriers ? Manon Ott répond à cette question au travers d’un livre-enquête et d’un film urbain, "De cendres et de braises" (Anamosa).
Chercheuse en sciences sociales et cinéaste, Manon Ott publie « De cendres et de braises » chez Anamosa, un portrait de la vie aux Mureaux qui s’interroge sur la disparition et les survivances de l’esprit ouvrier. Les Mureaux constituent un paysage étonnant, fait de tours et d’une usine en pleine campagne. Un espace construit dans les années cinquante pour accueillir les populations ouvrières. (...)
Le film se focalise principalement sur la jeune population de la cité. On constate une forme de dépolitisation de ces gens qui ont vu leurs parents répéter les même gestes toute leur vie sans jamais être reconnus. Manon Ott a fait le choix d’habiter aux Mureaux pour pouvoir faire émerger des paroles que l’on n’entend pas dans les reportages habituels, lesquels se focalisent sur le sensationnel et les événements parfois tragiques. Manon Ott, elle, s’est intéressée dans ce film en noir et blanc aux événements quotidiens et au regard souvent sensible que les habitants portent sur leur quartier. Son idée est de déplacer l’oeil du spectateur en donnant à voir l’espoir et les aspirations de ces jeunes qui ne veulent pas passer leur vie à l’usine. (...)
Le images de faits divers apparaissent dès lors comme un moyen de détourner l’attention des problèmes économiques. L’un des personnages se plaint de voir défiler aux Mureaux les ministres de l’intérieur sans jamais avoir reçu la visite d’un ministre du travail. Le cinéma devient ainsi un moyen de recherche unique pour documenter le réel et la relation horizontale que Manon Ott est parvenue à créer avec les habitants, évitant la position de surplomb propre à certaines enquêtes sociologiques qui ne rendent compte que partiellement des réalités de ces territoires.