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Pour « bien vieillir », des retraités conçoivent leur propre habitat coopératif et écologique
Article mis en ligne le 30 novembre 2019
dernière modification le 29 novembre 2019

Elle est la première coopérative d’habitants pour personnes vieillissantes en France : Chamarel-les-Barges, dans la banlieue de Lyon. Cette expérience pionnière ouvre la voie à une autre vision du vieillissement... et de la propriété.

Voilà un an et demi que Jean, Hélios et Madeleine ont emménagé à Chamarel-les-Barges, la première coopérative d’habitants, en France, pour personnes vieillissantes. Ils sont dix-huit, de plus de 60 ans, à partager cet immeuble de quatre étages à Vaulx-en-Velin, dans la banlieue de Lyon.

Le projet est né il y a dix ans, à la suite d’une discussion entre deux amies sur les difficultés de proches n’ayant pas anticipé leurs vieux jours. Rapidement, ils se réunissent à plusieurs, pointent les longues listes d’attente des maisons de retraite et leur coût, et entament une réflexion sur le « bien-vieillir ». Vieillissement ou pas, ils entendent rester actrices et acteurs de leur vie. Le groupe s’agrandit progressivement, avant de se lancer dans la création d’un lieu de vie. Après de multiples péripéties, ils déposent leur permis de construire en novembre 2014 et emménagent en juillet 2017.
« Il y en a qui ont mis plus d’argent pour permettre à d’autres de venir avec moins »

Les résidents versent chaque mois une redevance allant de 600 euros pour un T2 à 800 euros pour un T3, bien loin des prix exorbitants des Ehpad. Ce loyer sert à rembourser les prêts contractés par la coopérative et à payer les charges. Pour ce prix, ils ont également accès à plusieurs espaces communs : les coursives, deux chambres d’amis, une salle commune avec cuisine, un atelier bricolage, une buanderie, un bureau pour l’association Chamarel, une cave, ou encore un garage à vélos. « Avant de faire les travaux, on s’était renseignés sur le prix des locations en logements neufs à Vaulx-en-Velin, rappelle Patrick. On avait convenu avec l’équipe d’architectes qu’on ne voulait pas que les loyers ici aillent au delà des prix du marché. » (...)

Si la non spéculation fait partie des valeurs qui les a rassemblés, la solidarité financière leur tient aussi à cœur. Pour devenir résident, il faut normalement apporter 30 000 euros sous forme de parts sociales, récupérables si le résident s’en va. Une somme initiale que tout le monde ne pouvait pas acquitter. « Certains ont donc mis plus d’argent pour permettre à d’autres de venir avec moins », explique Hélios. Une manière de résoudre le problème de l’apport personnel dans les coopératives d’habitants, à mi chemin entre propriété privée et location [1]. « Nous sommes propriétaires collectivement de l’immeuble et du terrain, précise Chantal, tout en étant locataires puisque nous payons chaque mois une redevance ».
« A Chamarel, c’est le groupe qui prend les décisions »

A Chamarel-les-Barges, toutes les décisions sont prises au consensus, sur le principe « une personne égale une voix ». (...)

Les habitants se réunissent chaque semaine durant 2h30, sauf pendant les vacances. Une assemblée générale, regroupant les quarante adhérents de association – dont les habitants –, se tient chaque mois. Plusieurs commissions, comme les aménagements extérieurs ou l’éducation populaire, ont été créées. Résidents et adhérents de l’association se partagent différentes responsabilités allant du nettoyage et de la gestion des espaces communs aux relations avec l’extérieur, en passant par les dossiers administratifs et financiers. (...)

l’idée des coopératives d’habitants pour personnes vieillissantes essaime. Un groupe de seniors à Bègles, « les boboyaka », vient de déposer un permis de construire autour d’un habitat faisant « le pari de vieillir ensemble autrement » [5]. « On reçoit beaucoup de bandes de vieux qui se posent les mêmes questions que nous », souligne Patrick. Une délégation japonaise est même venue les rencontrer, préoccupés eux aussi par le vieillissement et l’écologie. Le 9 novembre dernier, ils ont accueilli leur millième visiteuse.