
Quelle stratégie politique pour une transition démocratique et sereine
vers des sociétés soutenables et souhaitables de Décroissance ?
Depuis le début des années 2000 et en particulier ces dernières années, on assiste à l’émergence d’initiatives locales citoyennes en rupture avec les schémas classiques de la société de croissance. En parallèle, en France, mais aussi dans d’autres pays, notamment latins, on assiste à la naissance de débats et aussi de mouvements politiques autour des idées de la Décroissance.
Aujourd’hui ces mouvements se questionnent sur la manière de faire vivre ces différentes démarches ensemble et sur la façon de colporter un nouveau projet de société tout en restant en cohérence avec cette pensée politique. Un des thèmes le plus souvent mis en avant dans la Décroissance est la relocalisation de l’économie et donc, par là, de la vie.
Ces initiatives locales, que l’on appelle alternatives concrètes, comme l’habitat partagé ou les AMAP par exemple, s’inscrivent toutes dans cette logique de réapprendre à vivre localement, à produire localement et ainsi à recréer des sociétés humaines permettant d’initier une transition vers une souveraineté alimentaire et énergétique. Ce livre propose de mettre en avant un certain nombre d’entre elles. (...)
Comme les villes en transition en France, ce type d’initiatives locales et concrètes rencontre un succès notoire auprès de personnes non intéressées ou lassées par le militantisme classique et ses codes. Souvent présentées comme non politiques, ces alternatives sont en effet en rupture avec la manière classique de faire de la politique consistant à se battre contre, et dont la stratégie ne s’inscrit que dans une logique de prise de pouvoir. En fait, elles reviennent à l’essence même de la Politique, celle de la vie de la Cité, en faisant participer tous les citoyens à la réappropriation de leurs choix de vie. (...)
L’enjeu aujourd’hui, autour de ces initiatives et de la richesse d’expériences qu’elles représentent, est d’arriver à tisser un réseau en construisant des liens, des ponts, des passerelles à la fois entres elles mais aussi avec les autres niveaux politiques de la Décroissance. Ce maillage permettrait de mettre en commun, de critiquer, de se rencontrer, mais aussi de gagner en visibilité, lisibilité et cohérence. Il éviterait par ailleurs le risque de repli sur soi et de communautarisme que cela représente, la dérive survivaliste (2) ou encore de se trouver rattrapé par des lois interdisant tout simplement ce type de démarche (3). (...)
L’ensemble de nos projets et actions doit représenter un « pas de côté », en se posant continuellement la question, avec humilité et respect, de la cohérence entre la pensée, le chemin et la méthode. (...)
Cette démarche peut être complémentaire de celle des partis traditionnels dont la stratégie privilégie la prise de pouvoir préalable. En effet, ces partis, soumis à l’agenda électoral et contraint par la réalité du financement des partis politiques ont à adapter leurs discours et stratégies au système. Toutefois certains de leurs membres partagent nos idées et peuvent être des relais pour à la fois communiquer sur nos idées et nous permettre d’initier ou de faire vivre nos alternatives concrètes à travers des lois et/ou des financements publics. Par contre, cela doit se faire en renversant l’imaginaire politique dominant qui laisse croire que tout viendra d’en haut et qu’il suffit de bien voter pour que tout aille mieux demain : ce n’est pas l’élu qui fait à la place du citoyen. L’élu permet aux citoyens de faire.
Changer de société pourrait bien être la conséquence d’une raison impérieuse que nous imposerait une nature devenue moins généreuse voire plus violente
(...)