
Le contesté projet de réforme des retraites sera examiné à partir du 2 mars par les sénateurs. L’exécutif en appelle « au bon sens » en prônant de nécessaires économies. Or la première réforme des retraites de 2010 a coûté cher à l’assurance-chômage, du fait de la hausse du nombre de seniors sans emploi à indemniser.
Le document vient tout juste d’être rendu public. L’Unédic, gestionnaire de l’assurance-chômage, a mis en ligne mercredi 1er mars en fin de journée une publication très éclairante sur « les interactions entre emploi, chômage et retraite » et leurs évolutions depuis 2010, date d’entrée en vigueur de la dernière réforme des retraites, repoussant l’âge légal de départ de 60 à 62 ans.
Ce document, que Mediapart s’est procuré avant publication, démontre que pour indemniser les 55 ans et plus, l’assurance-chômage dépense toujours plus : + 38 % depuis 2010. La CGT, dans un communiqué, alerte sur ces chiffres alors que le gouvernement entend faire passer une nouvelle réforme visant à faire travailler les salarié·es deux années supplémentaires, jusqu’à 64 ans. (...)
Pour le syndicat, l’exécutif va tout simplement déshabiller Pierre pour habiller Paul en reportant les dépenses des pensions de retraite pour les plus de 62 ans vers l’assurance-chômage. (...)
Le syndicat a par ailleurs fait « des demandes de chiffrage » à l’Unédic. Les réponses, que Mediapart a également pu consulter, jettent une lumière crue sur les inégalités de genre, les motifs de licenciement des seniors ou encore les effets de la réforme de l’assurance-chômage, couplée à celle des retraites.
Mediapart l’a maintes fois documenté : les entreprises se débarrassent de leurs seniors, l’âge est ensuite un frein majeur du retour à l’emploi (à tel point qu’un tiers des chômeurs de longue durée sont aujourd’hui des seniors) mais le gouvernement persiste à vouloir reculer l’âge légal de départ en retraite.
Alors que le Sénat entame jeudi 2 mars, en séance publique, l’examen du projet de loi, et à quelques jours (le 7 mars) d’un appel au « blocage du pays », reconductible dans certains secteurs, ces nouvelles données de l’Unédic apporteront sans nul doute du grain à moudre aux opposants au texte. (...)
Vers une diminution du maintien des droits jusqu’à la retraite ?
La première réforme de l’assurance-chômage a réduit l’accès et le montant des allocations. La seconde, entrée en vigueur le 1er février 2023, est venue s’attaquer à la durée des versements. Et cela pourrait bien pénaliser les seniors au chômage en grignotant leur accès au dispositif de maintien des droits.
Il permet aux 62 ans et plus n’ayant pas le nombre de trimestres pour une retraite à taux plein de bénéficier du maintien de leurs allocations chômage jusqu’à la retraite, même si leurs droits sont épuisés. Il est accordé sous certaines conditions, dont celle d’être indemnisé depuis au moins un an.
Or, selon l’Unédic, 7 % des bénéficiaires actuels du dispositif en seraient tout simplement privés du fait de la réforme, s’ils s’étaient inscrits après son entrée en vigueur. (...)
C’est ce qu’on appelle la double peine. Et elle ne va certainement pas s’alléger, si la réforme des retraites entre en vigueur.