
(...) un rapport parlementaire met le doigt sur la disparition des services publics dans les territoires ruraux. Et pointe une dématérialisation "menée à la hussarde".
C’est un réquisitoire contre la pratique du "New Public Management" qui, en quelques décennies, a conduit au "repli des services publics sous le signe des économies budgétaires". "La Révision générale des politiques publiques (RGPP) et sa version territoriale, la Révision de l’administration territoriale de l’État (RéATE), puis la Modernisation de l’action publique (MAP) ont durablement marqué le territoire", constatent les députés Jean-Paul Dufrègne (Gauche démocrate et républicaine, Allier) et Jean-Paul Mattei (Modem, Pyrénées-Atlantiques) dans un rapport sur les services publics dans les territoires ruraux, examiné par le comité d’évaluation et de contrôle (CEC) de l’Assemblée nationale, jeudi 10 octobre.
Si la mission d’évaluation des députés a été installée dès janvier 2018, avant la crise des gilets jaunes, celle-ci a donné un relief particulier à leurs travaux. "Cette demande de considération exprimée par les gilets jaunes, le pouvoir doit l’entendre malgré son caractère éruptif (…) elle constitue un signal adressé à l’État par une population travaillée par la révolte ou la résignation, qui éprouve un fort sentiment d’abandon", considèrent-ils.
"Remettre les boeufs avant la charrue"
S’appuyant sur un rapport de la Cour des comptes de mars, les deux députés parviennent à une conclusion moins optimiste du retrait des services publics. La question du numérique est "un enjeu vital", il permet de compenser "l’enclavement" des territoires isolés, de développer le télétravail... Seulement la couverture est loin d’être achevée : 7 millions de Français n’ont "pas accès à la qualité minimale de connexion". Bien plus, "menée à la hussarde" - avec pour principal souci de faire des économies -, "la dématérialisation a accentué la fracture territoriale". En 2018, 93% des réclamations adressées aux délégués du Défenseur des droits avaient trait aux difficultés rencontrées dans la relation avec les services publics, contre 84 % en 2017, constatent-ils. Les députés préconisent donc de "remettre les bœufs avant la charrue". Les administrations doivent par exemple revenir aux fondamentaux : proposer des modalités d’accès multicanal (en ligne, avec possibilité d’accès téléphonique et physique). Le rapport met aussi l’accent sur l’accompagnement des usagers. Une "cartographie" référençant les dispositifs d’accompagnement sur les territoires est en cours d’élaboration, précise-t-il. (...)
Il faut "sortir de la tyrannie de la démographie", en prenant en compte "la vulnérabilité économique et sociale" des populations avant d’envisager l’implantation des services publics. L’emploi public doit également être vu comme un outil d’aménagement du territoire. (...)
Les rapporteurs saluent l’arrivée des maisons France services, tout en se demandant si elles s’inscrivent dans la continuité des Maisons de service au public (MSAP) ou si elles marquent une rupture dans la qualité de l’offre. (...)
Pour les rapporteurs, il n’y a pas non plus d’attractivité sans un "bouquet de services" : école, logement, soins (centres de santé, stages d’internat obligatoires, accès aux soins en moins de vingt minutes…)… (...)
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