
(...) Les nouvelles législations, dont la nouvelle Loi El Khomri vise à reconfigurer le droit du travail « en subordonnant la négociation collective d’entreprise à la recherche de la compétitivité ». Il y a là un déplacement significatif d’un droit visant à « corriger » la subordination des salarié-es dans l’entrepris à un droit de défense des intérêts des sociétés. (...)
« Etrangement, certains syndicalistes défendent le principe de subordination comme fondateur de droits, alors qu’il n’est que le résultat négatif de la reconnaissance douloureuse du collectif. La portée subversive de droits étendus, par exemple le droit de tous et toutes à participer au travail, dans une société sans chômage, ou le droit de « participer à la gestion des entreprises » (préambule de la Constitution) débouche sur un dépassement de la logique contractuelle, vers une logique de droits politiques universels (droit au salaire, salarisation de la protection sociale, contrôle du travail), et une logique pleinement statutaire » (pour-lemancipation-le-droit-davoir-des-droits/) et « Les « besoins de l’entreprise » sont donc juridiquement compris comme les intérêts des propriétaires du capital, que l’on assimile abusivement dans le texte de loi aux intérêts de toutes les « parties prenantes » selon l’expression aujourd’hui courante. » (la-loi-travail-est-dangereuse/)
Josépha Dirringer analyse l’ubérisation, le capitalisme de plateforme, ces espaces où il semble n’y avoir ni contrat de travail, ni société employeur, ni entreprise comme relation de travail. « Le pouvoir devient évanescent et la violence économique reste toujours aussi vive ». Et pourtant, il y a une forme particulière d’intermédiation, de subordination organisée.
L’auteure revient sur les « conditions de limitation de responsabilité », sur l’article introduit dans le Code du travail en 1994 de « présomption de non-salariat ». Elle analyse les liens de subordination, les relations contractuelles dissimulant « l’existence d’un contrat de travail », les conditions imposées de manière unilatérales par Uber, le modèle économique ne s’appuyant pas directement sur l’exercice d’un pouvoir de direction…
Elle discute de l’attachement des droits sociaux « à la personne, à l’individu, et non statut », du risque d’individualisation, de l’absence d’encadrement du pouvoir économique du donneur d’ordre, d’« assujettissement généralisé des individus « actifs » ». (...)