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Voie ouverte à un référendum d’initiative partagée sur la privatisation d’ADP
Article mis en ligne le 10 mai 2019

Dans une décision historique, le Conseil constitutionnel a validé l’idée de soumettre au vote la cession d’Aéroports de Paris. La prochaine étape consistera à recueillir le soutien de 4,7 millions de Français.

La décision est historique, presque inespérée. Le Conseil constitutionnel a ouvert la voie, jeudi 9 mai, à une nouvelle étape en direction de l’organisation d’un référendum d’initiative partagée (RIP) qui pourrait empêcher la privatisation d’Aéroports de Paris (ADP). Les magistrats ont validé la proposition de loi référendaire, déposée par 248 parlementaires de tous bords politiques le 10 avril, et qui veut donner le caractère de « service public national » aux aéroports de Paris-Charles-de-Gaulle, Paris-Orly et Paris-Le Bourget. (...)

S’ouvre maintenant une nouvelle étape sur le long parcours d’obstacle pouvant conduire à un référendum : le recueil du soutien de 10 % des électeurs (4 717 396 de Français, précise la décision du Conseil constitutionnel) à cette proposition qui doit s’effectuer dans un délai de neuf mois. Il commencera à la publication d’un décret gouvernemental, un mois maximum après la parution de cette décision au Journal officiel. Il sera organisé par le ministère de l’intérieur, sous le contrôle du Conseil constitutionnel, par voie électronique, sur un site Internet spécial. (...)

Cette grande première sur le plan institutionnel depuis l’inscription du RIP dans la Constitution, en 2008, est aussi un puissant revers pour l’exécutif. Jeudi, le gouvernement a été contraint d’annoncer le report de la privatisation, qui avait pourtant été votée par le Parlement. « Aucune décision sur la privatisation d’ADP ne sera prise dans le délai de la procédure », a-t-il fait savoir. (...)

Avec cette décision, Emmanuel Macron se trouve de plus mis en échec par son opposition de droite et de gauche, dont l’alliance inédite a permis d’atteindre pour la première fois le seuil des 185 parlementaires nécessaire pour déclencher une telle procédure. (...)

Ceux-ci ont saisi l’opportunité politique de ce sujet devenu très populaire dans le cadre de la crise des « gilets jaunes ». Le renoncement à la privatisation d’ADP s’est en effet petit à petit installé comme l’une des revendications du mouvement, s’appuyant sur le douloureux souvenir de la privatisation des autoroutes.

Politiquement, pour le gouvernement, c’est la double peine : non seulement cette décision met un coup d’arrêt à son projet, mais la phase de recueil des signatures va ouvrir neuf mois d’une campagne politique pour ou contre le chef de l’Etat, sur fond d’opposition à la privatisation. (...)

Reste que le référendum est encore loin d’être en vue. (...)

Même si ce cap est atteint, le Parlement pourra ensuite, dans un délai de six mois, se prononcer sur la proposition de loi. Si l’Assemblée nationale et le Sénat mettent le texte à leur ordre du jour, alors il n’y aura pas de référendum. Mais si seule l’une des chambres se prononce, ou aucune d’entre elles, alors le président de la République sera tenu d’organiser le référendum. Un calendrier qui conduit au courant de l’année 2020. (...)

Sur le plan institutionnel aussi, les enseignements de cette décision sont forts. Elle montre que le mur du RIP, réputé infranchissable, se gravit, alors qu’Emmanuel Macron lui-même a proposé lors de sa conférence de presse du 25 avril d’abaisser son seuil de déclenchement à 1 million de soutiens à obtenir auprès des Français afin de le rendre plus accessible.

C’est ensuite la première fois que le Conseil constitutionnel se prononce sur cette procédure, sa décision fera donc jurisprudence. (...)

Dès jeudi soir, les opposants à la privatisation se projetaient sur l’étape suivante : le recueil des signatures. « Une large mobilisation est nécessaire. Les insoumis·es appellent à fédérer les efforts sur le terrain », a écrit sur Twitter Jean-Luc Mélenchon.

« Nous nous félicitons de cette décision favorable à la démocratie qui donne au peuple souverain toute la place qu’il mérite », ont, de leur côté, écrit les députés communistes dans un communiqué qui annonce qu’ils prendront « toute [leur] part » dans la collecte « avec l’appui de [leurs] forces militantes ». La section CGT d’ADP s’est aussi réjouie de la décision, qui « valide son action menée depuis vingt mois ». Après cette « première victoire, gagnons le référendum », dont « les citoyens vont pouvoir se saisir », ajoute le syndicat. (...)