
Le ministère américain de la Défense a annoncé qu’un détenu tunisien a été rapatrié vers son pays d’origine après avoir passé plus de 20 ans à Guantanamo sans jamais avoir été inculpé. Ridah Ben Saleh al-Yazidi avait été transféré vers le camp de détention à Cuba dès son ouverture en 2002. Alors que Joe Biden espérait réussir à la fermer sous son mandat, 26 personnes y sont toujours emprisonnées
(...) "Ridah Ben Saleh al-Yazidi a été jugé éligible au transfert", précise ce document. "Le 31 janvier 2024, le secrétaire d’État à la Défense Austin a informé le Congrès de son intention de soutenir ce rapatriement et, en consultation avec notre partenaire tunisien, nous avons rempli les conditions d’un transfert digne de confiance".
Emprisonné depuis 2002 (...)
Selon le New York Times, il s’était rendu en Afghanistan en 1999 où il avait participé à un camp d’entraînement pour jihadistes. Les forces pakistanaises l’ont capturé près de la frontière avec l’Afghanistan en décembre 2001 au sein d’un groupe d’une trentaine d’hommes ayant fui la bataille de Tora Bora. "Certains d’entre eux étaient soupçonnés d’être des gardes du corps de Ben Laden et étaient donc particulièrement intéressants dans les premiers efforts visant à localiser le chef d’Al-Qaïda", ajoute le quotidien américain. Dix ans après, c’est au Pakistan que le commanditaire des attaques du 11-Septembre sera finalement tué lors d’un raid américain.
Décrit comme un "détendu dangereux" et "hostile envers les gardes", Ridah Ben Saleh al-Yazidi a pourtant été répertorié sous l’administration Obama en 2010 comme un prisonnier ne pouvant être poursuivi pour crimes de guerre et pouvant être transféré sous la garde d’un autre pays. Pourquoi a-t-il donc fallu attendre si longtemps avant son rapatriement ? Interrogé par le New York Times, Ian Moss, un ancien membre du Département d’Etat qui a organisé des transferts de prisonniers de Gantanamo, estime qu’il n’est pas parti plus tôt car la Tunisie était "jugée trop dangereuse ou peu intéressée pour l’accueillir". "Il aurait déjà pu partir il y a quelque temps sans la lenteur des Tunisiens", estime Ian Moss.
Quatre transferts en un mois (...)
Après son arrivée à la Maison Blanche en 2021, le président Joe Biden s’était fixé comme objectif initial de fermer le centre de détention de Guantanamo. Même si les transferts se sont accélérés ces dernières semaines, les États-Unis sont loin du compte. Alors que la prison détenait 40 détenus au début du mandat de l’ancien sénateur démocrate, ils sont toujours 26 à y être détenus, dont le Yéménite Ali Hamza Ahmad al-Bahlul, un lieutenant d’Oussama Ben Laden, condamné à perpétuité en 2008. "Quatorze sont éligibles à transfert, trois sont éligibles à une commission d’examen périodique, sept sont engagés dans un processus de commission militaire et deux ont été reconnus coupables et condamnés par des commissions militaires", détaille le Pentagone.
Le président Barack Obama avait également promis de fermer Guantanamo lors de sa campagne, mais avait échoué dans cette entreprise au cours de ses huit ans à la tête du pays (2009-2017). Son successeur Donald Trump avait ensuite signé un décret en janvier 2018 pour maintenir l’installation ouverte. Le milliardaire n’avait alors caché son intention d’y envoyer davantage de "méchants" capturés en Syrie ou en Irak, même si cela n’a jamais été suivi d’effets.
Au total, 779 hommes sont passés par Guantanamo depuis 2002 dont certains accusés d’avoir participé aux attentats du 11-Septembre. Des prisonniers originaires de 19 pays : plus de la moitié sont issus du Yémen, les autres venant notamment d’Afghanistan, d’Arabie saoudite, d’Égypte, du Pakistan, de Chine ou de Russie. (...)
Un symbole des violations des droits humains
Véritable épine dans le pied de Washington, cette prison n’a pas accueilli de nouveaux prisonniers depuis 2008. Elle représente depuis plus de vingt ans un symbole de violations des droits humains. (...)
"une surveillance quasi constante, des extractions forcées des cellules, l’utilisation excessive de moyens de contention", "des carences structurelles en matière de santé, un accès inadéquat aux familles" et "des détentions arbitraires caractérisées par la poursuite des violations du droit à un procès équitable". (...)