
Toutes les deux semaines, une chronique rédigée par le collectif internationaliste franco-syrien Interstices-Fajawat, afin de mieux comprendre la situation complexe, mouvante et passionnante en Syrie suite à la chute de la dictature. Voici le dixième épisode, ce 13 avril 2025, écrit depuis la Syrie.
Le rythme de nos chroniques s’est un peu ralenti, parce que nous nous sommes déplacés de Suwayda vers Damas et sa périphérie, où nous avons passé plusieurs jours dans les quartiers martyrisés de Yarmouk, Tadamon et Darayya. Nous y avons rencontré et interviewé des résident-es, ou plutôt des survivant-es, et nous avons traversés des espaces dont l’étendue de destruction est difficile à décrire. (...)
Les ancien-nes habitant-es, dont beaucoup sont des réfugié-es de Palestine (1948) et du Golan (1967), reviennent doucement re leurs marques dans des paysages dévastés où chaque « rue » reste marquée par la mémoire fantôme de meurtres et de massacres commis par les occupants des lieux, qu’ils soient des mercenaires d’Assad où des groupes liés à Jabhat Al-Nusra ou à l’Etat Islamique. (...)
Instabilité à Deraa, berceau de la révolution de 2011
Le 3 avril, l’armée d’occupation israélienne s’est heurté une première fois à une opposition armée dans les environs de Nawa (Gouvernorat de Deraa), alors qu’elle tentait de s’emparer d’un nouveau barrage hydraulique. En réponse à la résistance locale Israël a lancé une frappe sur la ville, tuant 11 civils. Des manifestations ont surgi dans plusieurs villes du pays et les funérailles des martyrs ont rassemblé plusieurs milliers de personnes à Nawa.
Si le « gouvernement de transition à durée indéterminée » a bien condamné les frappes et l’invasion israélienne, sa réaction reste timide et Sharaa brille toujours par son absence auprès des populations de Deraa, qui sont pourtant les premières à avoir fait trembler le pouvoir d’Assad en 2011. Dans le même temps, Israël a réduit à néant l’aéroport militaire de Hama, faisant monter d’un cran la tension avec la Turquie qui ne cache pas ses intentions d’installer des bases militaires au cœur de la Syrie. Au cours des dernières heures, les médias locaux et internationaux n’ont cessé de monter en épingle la confrontation virile entre Netanyahu et Erdogan : espérons que la Syrie ne devienne pas de nouveau le terrain de confrontation de leurs impérialismes mégalomaniaques.
Toujours à Deraa, des affrontements ont eu lieu ce 11 avril entre les Forces de la Sécurité Générale et les membres d’une faction au passé controversé, la 8ème Brigade. Instabilité à Deraa, berceau de la révolution de 2011
Le 3 avril, l’armée d’occupation israélienne s’est heurté une première fois à une opposition armée dans les environs de Nawa (Gouvernorat de Deraa), alors qu’elle tentait de s’emparer d’un nouveau barrage hydraulique. En réponse à la résistance locale Israël a lancé une frappe sur la ville, tuant 11 civils. Des manifestations ont surgi dans plusieurs villes du pays et les funérailles des martyrs ont rassemblé plusieurs milliers de personnes à Nawa.
Si le « gouvernement de transition à durée indéterminée » a bien condamné les frappes et l’invasion israélienne, sa réaction reste timide et Sharaa brille toujours par son absence auprès des populations de Deraa, qui sont pourtant les premières à avoir fait trembler le pouvoir d’Assad en 2011. Dans le même temps, Israël a réduit à néant l’aéroport militaire de Hama, faisant monter d’un cran la tension avec la Turquie qui ne cache pas ses intentions d’installer des bases militaires au cœur de la Syrie. Au cours des dernières heures, les médias locaux et internationaux n’ont cessé de monter en épingle la confrontation virile entre Netanyahu et Erdogan : espérons que la Syrie ne devienne pas de nouveau le terrain de confrontation de leurs impérialismes mégalomaniaques.
Toujours à Deraa, des affrontements ont eu lieu ce 11 avril entre les Forces de la Sécurité Générale et les membres d’une faction au passé controversé, la 8ème Brigade. (...)
La confrontation s’est déroulée à la suite d’une tentative de désarmement des éléments de la 8ème Brigade, qui s’est soldée par la mort d’un leader militaire local ayant rejoint le nouveau Ministère de la Défense, Bilal Al-Droubi. Après 24 heures de tensions, un accord a été trouvé et plusieurs membres de la 8ème Brigade impliqués dans la mort de l’officier ont été arrêtés. Mais Al-Awda reste intouchable.
Suwayda continue de bouillir
Dans le gouvernorat voisin à majorité Druze, la fracture se creuse entre ceux qui privilégient une conciliation avec le gouvernement central et ceux qui rejettent catégoriquement et frontalement l’autorité incarnée par Al-Sharaa (...)
Face à la défiance de Suwayda, le « gouvernement intérimaire durable » se montre étonnamment stoïque. Il n’y a toujours aucun élément de la Sécurité Générale dans la région, et le gouverneur Mustafa Al-Bakkur fait preuve d’une bonhomie surprenante, rendant visite à tous les leaders locaux y compris ceux qui rejettent son autorité pour partager des sucreries à l’occasion de l’Aïd Al-Fitr.
Cette affabilité ne l’a pas empêché d’être pris à parti avec virulence le 7 avril à la suite de l’arrestation de 20 activistes de Suwayda à un checkpoint sur la route de Raqqa, où des acteurs de la société civile devaient participer à une rencontre politique organisée par l’Alliance Syrienne pour l’Égalité Citoyenne, une organisation civile initiée depuis le Rojava. Leur arrestation et leur détention brutales dans une prison à Idleb a suscité une vague d’inquiétude et de mécontentement au sein des organisations de la société civile et de défense des libertés publiques. (...)
De Suwayda au Rojava, en passant par Bosra Al-Sham et le littoral Syrien, l’autocratie temporaire de Al-Sharaa est loin de faire l’unanimité, et Israël et la Turquie ne semblent pas même vouloir lui laisser le temps de faire illusion. En Syrie, à défaut de croire à une transition démocratique prochaine, on croise les doigts pour qu’au moins la paix l’emporte…