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En 2025, le travail forcé se généralise avec la réforme du RSA
#RSA #travail
Article mis en ligne le 7 janvier 2025
dernière modification le 5 janvier 2025

Charles Booth, l’un des premiers sociologues anglais, au 19è siècle disait : “Les riches ont tiré sur les pauvres un rideau sur lequel ils ont peint des monstres”. Aujourd’hui comme hier, la guerre aux pauvres bat son plein.

Alors que plus de 9 millions de personnes vivent sous le seuil de pauvreté en France, qu’un enfant sur cinq ne mange pas à sa faim, que le scorbut fait son retour et que les plans de licenciement d’ampleur s’enchaînent, la réforme du RSA est entrée en vigueur le 1er janvier. 1,8 millions de personnes qui vont devoir justifier de 15h d’activité hebdomadaire ou perdre leur filet de sécurité.

“Accompagnement rénové” est un euphémisme de technocrate qu’on traduit plutôt par travail forcé, sans contrat de travail, sans cotisation, sans droit, et moins payé que le SMIC horaire. Le RSA, c’est déjà l’aumône. 608 € versés aux personnes sans emploi ni ressources, pour éviter de sombrer dans l’extrême pauvreté. Il faut être le plus déconnecté des politiques (ou le plus retors des capitalistes) pour affirmer que des êtres humains “profitent” de quoi que ce soit avec 600 euros par mois. On rappelle que le seuil de pauvreté est fixé à 1216 euros par mois, et qu’un tiers des personnes pouvant bénéficier du RSA ne le demande pas (par manque d’information, par honte ou par complexité des démarches).

Cette loi, qui vise officiellement à remettre les chômeurs longue durée au travail et à faire des « économies », est une provocation alors que, dans le même temps, l’État français verse 200 milliards d’euros par an d’aides publiques aux entreprises sans aucune contrepartie et n’a toujours pas rétabli l’ISF. En comparaison, la réforme du RSA ne dégage quasiment aucune économie, c’est juste une manière de punir toujours plus les précaires parmi les précaires. (...)

Travaille ou crève

La Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) s’est indignée de cette réforme “attentatoire aux droits humains”. Elle précise qu’il s’agit là “d’une relégation inacceptable des droits humains derrière les priorités économiques dans l’élaboration et la mise en œuvre des politiques sociales”. La défenseuse des droits s’est également élevée contre cette loi : “Qu’est-ce que cette société qui va renforcer les inégalités au lieu de lutter contre ? Ce texte marque un renversement de ce qu’est notre droit constitutionnel”. (...)

Accentuer la contrainte, une politique inefficace (...)

En réalité, le but de la réforme est de pousser toujours plus de gens à renoncer à leurs droits.

Esther Duflo, prix Nobel d’économie, explique même que dans les pays avec un système social dans lequel les minimas sociaux sont non conditionnés, ou en tout cas non conditionnés à une activité, il n’y a absolument pas plus d’abus, les gens ne travaillent pas moins. (...)

La réalité, c’est que l’État veut réduire ses dépenses sur le dos des pauvres. En outre, de nombreuses questions restent sans réponse ? Comment justifiera-t-on de ces 15h d’activité ? Comment feront les personnes sans moyen de transport ? Comment les agent-es de “France Travail” (on a toujours autant de mal à l’écrire tant la formule écorche la bouche) vont pouvoir gérer ces 1,8 millions de personnes nouvellement inscrites dans leurs services ? Enfin, cette mesure risque en réalité d’augmenter le chômage : les patrons vont-ils garder des salarié-es sous contrat alors que l’État leur offre une main d’œuvre gratuite et sans droits ?

Le chômage est un choix politique (...)

Le capital a besoin d’une main d’œuvre abondante et la plus précaire possible. Et pour ce faire, il utilise une rhétorique ancienne, celle de la stigmatisation du pauvre. (...)

Le discours de l’assistanat est une rhétorique politique qui sert tout simplement les intérêts de l’État et du patronat. C’est la recette du néolibéralisme : faire peser la responsabilité de l’échec d’un système sur l’individu, afin d’éviter d’avoir à remettre en cause le système lui-même. (...)