
Contrairement à ses dénégations, le ministre des armées a bien participé à un moment convivial avec Marine Le Pen au domicile de son ami Thierry Solère. Il a même échangé sur la guerre en Ukraine avec la dirigeante d’extrême droite, dont le parti a été financé par Moscou
Le mensonge ne pouvait plus tenir, au risque de rendre ses dénégations plus suspectes encore. Contrairement à ce qu’assurait son cabinet depuis des mois, le ministre des armées, Sébastien Lecornu, a bien été convié aux dîners confidentiels organisés par Thierry Solère, conseiller de l’ombre du pouvoir, avec les leaders du Rassemblement national (RN). Face à l’évidence – plus personne, y compris dans son entourage, n’osait mentir sur le sujet –, il a fini par admettre qu’il avait participé à plusieurs rendez-vous avec Marine Le Pen.
Ces rencontres secrètes, qui n’ont pas été consignées dans l’agenda de Sébastien Lecornu, se sont tenues au printemps dans un cadre tout à fait informel, amical et resserré, aucun autre membre du ministère des armées n’ayant été invité et aucun compte rendu n’ayant été rédigé. Le ministre n’en avait d’ailleurs pas informé le reste du gouvernement, alors même qu’il s’est permis d’aborder au cours de l’un de ces échanges avec la dirigeante d’extrême droite le sujet de la guerre en Ukraine. (...)
Le chef de l’État était-il au courant des rencontres de son ministre avec Marine Le Pen ? Questionné par Libération sur les fameux dîners de Thierry Solère, l’entourage d’Emmanuel Macron s’était contenté de se désolidariser des rendez-vous de l’ancien conseiller à l’Élysée avec les leaders d’extrême droite, sans dire un mot sur la présence de Sébastien Lecornu à certains d’entre eux. Interrogé plus précisément par Mediapart, l’Élysée indique que le président de la République n’avait pas été informé.
Gabriel Attal demande des comptes (...)
Le rôle de cheville ouvrière de Thierry Solère n’a surpris personne parmi celles et ceux qui étaient au fait de l’affaire, tant le conseiller a exercé ces dernières années ses talents d’intermédiaire. L’ancien député des Hauts-de-Seine, multi-mis en examen dans une vaste enquête portant notamment sur des soupçons de trafic d’influence, a aussi créé en décembre 2022 sa société de conseil en « affaires publiques » – l’autre nom du lobbying –, ce qui peut expliquer le besoin de densifier son carnet d’adresses, en l’adaptant au contexte politique.