
Le plasma sanguin, le composant liquide du sang, est indispensable pour soigner de nombreuses pathologies. Face à une pénurie croissante et à une dépendance massive aux importations américaines, la France cherche à renforcer le don volontaire sur son territoire. Une question de souveraineté sanitaire.
La France ne veut plus dépendre du sang américain. Sur le territoire français, les dons de plasma, de sang et de plaquettes sont bénévoles, volontaires, anonymes et non rémunérés. Mais le nombre de donneurs reste insuffisant, obligeant le pays à importer 65 % de son plasma des États-Unis.
Or, la demande est de plus en plus importante, car le plasma permet de soigner de nombreuses maladies. Ce liquide jaune, comparé par certains à de l’or, est la partie du sang dans laquelle baignent les cellules, les globules rouges, les plaquettes et les globules blancs. Utilisé sous forme de transfusions ou transformé en médicament, il permet d’apporter des facteurs de coagulation pour soigner l’hémophilie, de l’albumine utilisée en réanimation et pour les grandes brûlures, ou encore des immunoglobulines indispensables pour certaines personnes souffrant de déficits immunitaires congénitaux.
Contrairement à la France, aux États-Unis les donneurs sont rémunérés entre 40 et 100 dollars. Des centres de collectes privé y sont installés, surtout dans les quartiers populaires, aux abords des campus, ou de la frontière mexicaine.
Un business florissant aux États-Unis (...)
Bien que la rémunération des donneurs soit interdite sur le territoire français, le Laboratoire du fractionnement et des biotechnologies (LFB), propriété de l’État français, exploite lui aussi six centres de collecte outre-Atlantique : en Alabama, au Colorado, en Floride, en Caroline du Nord et en Caroline du Sud.
Aux États-Unis, certains donneurs de plasma en ont même fait un métier, puisqu’ils peuvent se faire prélever jusqu’à deux fois par semaine, soit 104 fois par an. En comparaison, en France, le don de plasma ne peut s’effectuer que tous les 15 jours. "On ne connaît pas les conséquences de donner si souvent donc il y a un vrai risque sur la santé du donneur", redoute un responsable de l’Établissement français (EFS) du sang à 20 minutes, qui déplore le recours par défaut au marché américain. (...)
Cette dépendance au plasma expédié depuis des milliers de kilomètres soulève une question de souveraineté sanitaire.
Encourager les dons de plasma
En France, l’EFS, opérateur unique national, assure la collecte des produits sanguins. Le plasma obtenu est ensuite envoyé à LFB. Mais la France ne produit que 30 % des besoins des malades.
La France n’est d’ailleurs pas un cas isolé. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) encourage les pays à viser l’autosuffisance, redoutant qu’une éventuelle pénurie américaine ne fragilise l’ensemble de la filière mondiale.
Même si elle importe du plasma de donneurs rémunérés aux États-Unis, la France a fait le choix de maintenir, sur son territoire, un système fondé sur le volontariat pour des raisons éthiques : éviter la marchandisation du corps humain.
Plus contraignant qu’un don de sang, le don de plasma nécessite du matériel spécial, il doit donc se pratiquer dans des "maisons du don" et dure environ une heure. Le prélèvement est réalisé par "aphérèse". Seul le plasma du sang du donneur est extrait. Les globules rouges lui sont restitués. Cette méthode permet de collecter deux à trois fois plus de plasma que lors d’un don de sang.
Donneurs rémunérés en Allemagne, Autriche et République tchèque
Autre initiative qui pourrait favoriser le don en France, les députés viennent d’adopter le 4 juin une loi pour faciliter le don du sang des salariés lors de leur temps de travail. Le texte, transpartisan, est désormais entre les mains du Sénat. "Il est indispensable d’élargir notre vivier de donneurs, de lever les freins à l’engagement régulier en faveur du don du sang et de reconnaître le don comme acte citoyen", plaidait en juin le député Les Républicains Pierre Cordier, auteur de la proposition de loi.
Depuis le 1er septembre également, les règles pour donner son sang ont été assouplies. Il faut désormais patienter deux mois, et non quatre, pour faire un don après un tatouage ou un piercing.
Ailleurs en Europe, la vente du plasma est autorisée en Autriche, en République tchèque ou encore Allemagne, où un donneur peut recevoir entre 20 et 25 euros par don. Résultat, environ un tiers des Allemands donnent régulièrement. La France importe du plasma issu de ces trois pays, notamment via une vingtaine de centres ouverts par le LFB.