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Protection de l’enfance : les mineurs isolés étrangers toujours dans l’impasse d’une prise en charge décente
#enfance #MNA #sansabri #migrants #immigration
Article mis en ligne le 1er février 2025

Dans une décision publiée mercredi, la Défenseure des droits s’inquiète de "la dégradation de plus en plus préoccupante de la protection de l’enfance" en France. Tous les jeunes sont concernés par de "lourdes défaillances" du système, et les mineurs isolés étrangers ne font pas exception. Ils réclament depuis des années à l’État une prise en charge plus digne pour sortir de la rue.

Accroître le soutien financier aux départements, recruter davantage d’assistants sociaux en milieu scolaire, renforcer les moyens de la justice : Claire Hédon, la Défenseure des droits, interpelle l’État, dans une décision publiée mercredi 29 janvier Elle le presse d’agir face aux "lourdes défaillances" observées dans la protection de l’enfance : maltraitance, refus de prise en charge, placements dans des lieux non autorisés par la loi... Les griefs sont nombreux. Parmi eux, celui de la question des mineurs étrangers, point de crispation régulière entre l’État et les départements.

Dans sa décision, la Défenseure des droits appelle ces derniers à procéder à des ajustements pour "redresser" la situation : au niveau départemental, surtout, elle incite à améliorer les dispositifs d’accueil provisoire en se mettant davantage "en lien avec les préfectures" - et donc l’État. Pour rappel, depuis 2013, dans le cadre de leur mission de protection de l’enfance, ce sont les départements qui ont la responsabilité de l’accueil, l’évaluation, l’hébergement et la prise en charge des mineurs isolés.

Mais cette responsabilité est devenue une charge trop lourde à porter seuls, se plaignent depuis des années les départements. En cause, notamment, l’hébergement des mineurs étrangers.
Des dispositifs d’accueil qui "explosent" en région (...)

Le rappel à l’ordre de la Défenseure des droits résonne d’autant plus que plusieurs conseils départementaux ont déjà jeté l’éponge. Par le passé et en toute illégalité, certains départements ont décidé de suspendre l’accueil et la prise en charge de mineurs non accompagnés. Faute de places, se défendent-ils. (...)

Des mineurs étrangers "en errance"

En mai dernier, face à la situation, 27 organisations (dont la Ligue des droits de l’Homme, Médecins du Monde, Médecins sans frontières) avait tiré la sonnette d’alarme. Elles avaient saisi le Conseil d’État pour contraindre la France - et les départements - à respecter les dispositions de la Convention des droits de l’enfant dans l’accueil des mineurs étrangers isolés. (...)

Car c’est généralement sur les trottoirs que ces jeunes étrangers dorment, faute de mieux. Leurs profils se mélangent : il y a des nouveaux arrivants mais surtout des jeunes en recours - c’est à dire refusés par un département car considéré comme majeurs mais faisant appel de cette décision. En attendant la réponse d’un juge pour enfants, ils restent dehors. "Des centaines d’enfants et adolescents continuent d’être laissés à la rue pendant plusieurs mois entre la décision de refus de protection des départements et celle du juge des enfants qui reconnaît finalement leur minorité et leur isolement", dénoncent ainsi les organisations. (...)

Le problème n’est pas nouveau pour la Défenseure des droits. Ni reconnus mineurs, ni reconnus majeurs, ils sont "très souvent en errance, sans prise en charge éducative, dans l’attente du prononcé de la décision du juge des enfants", exposait déjà Claire Hédon dans un rapport sur les mineurs non accompagnés paru en février 2022.

Les solutions sont rares : impossible pour ces jeunes de penser par exemple à changer de départements pour tenter une mise à l’abri ailleurs. (...)

Si un jeune a déjà été déclaré majeur quelque part en France, les départements voisins le sauront - ce qui n’était pas le cas avant.
Des mineurs confrontés à la faim

Les mises à l’abri par les mairies existent mais elles sont exceptionnelles et ponctuelles - les municipalités demandant aussi l’aide de l’État pour héberger ces jeunes. (...)

Face à ces refus d’accueil pérenne, face aux démantèlements de leurs campements informels installés dans l’espace public, certains mineurs se tournent alors vers les squats de bâtiments. A Paris, depuis presque deux mois, des centaines de jeunes étrangers, se déclarant mineurs, occupent les locaux de la Gaité lyrique pour réclamer leur prise en charge. Pour combien de temps ?, s’inquiètent les associations qui craignent une expulsion.

Les exemples sont là encore nombreux : à Toulouse, dans le sud de la France, une centaine de jeunes migrants avaient occupé début 2024 un gymnase où ils avaient trouvé refuge. Mais ils ont été expulsés au mois de mars. Auparavant, ces derniers avaient déjà été évacués par la préfecture d’un bâtiment universitaire.

En attendant que "l’État et les départements (investissent) dans une démarche conjointe de coordination", comme le recommande la Défenseure des droits, les jeunes continuent de se débrouiller seuls. Et l’aide associative ne suffit pas toujours. (...)