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CNRS
Quelle forêt pour demain ?
#forêts #arbres #rechauffementclimatique #secheresse #ecosysteme #ONF
Article mis en ligne le 22 août 2024
dernière modification le 20 août 2024

Comment aider nos forêts à faire face aux nouvelles contraintes climatiques et les protéger de l’extinction ? Les hêtraies cathédrales de Normandie, les forêts de chênes sessiles du Nord de la France, notamment, seront-elles toujours adaptées dans un contexte où les épisodes de sécheresse vont se multiplier ? « Comme tous les êtres vivants, les arbres ont toujours migré naturellement en fonction des bascules climatiques, à raison de quelques kilomètres par siècle, explique Jonathan Lenoir, écologue au laboratoire Écologie et dynamique des systèmes anthropisés1 (Edysan). Mais le changement climatique actuel est si brutal que pour y faire face, il faudrait qu’ils se déplacent cent fois plus vite ! »

Dans ce contexte, la plantation d’arbres, déjà très pratiquée dans nos forêts de l’ouest européen, pourrait être un outil précieux pour aider la forêt. L’idée générale : plus au nord, planter des arbres déjà adaptés aux conditions chaudes et sèches de régions plus méridionales. Un coup de pouce qui porte un nom en écologie : la « migration assistée d’espèces ». Cette pratique consiste ainsi à déplacer une espèce hors de sa zone de distribution de prédilection. Dans la moitié nord de la France, où les épisodes de sécheresse se multiplient, il s’agit de planter par exemple des chênes verts ou tauzins qui, plus méridionaux, ont besoin de moins d’eau pour s’épanouir que les chênes locaux, leurs cousins sessiles ou pédonculés.
Implanter de nouvelles essences : oui, mais…

Cette stratégie de migration fait déjà l’objet de nombreux tests. (...)

Mais déplacer des essences de la sorte n’est pas sans risque et les écologues préconisent d’avancer à pas comptés sur le sujet. (...)

« Le risque est que, si l’on procède au remplacement trop rapidement, ces arbres adaptés aux régions méditerranéennes accélèrent le dessèchement de la forêt », alerte Jonathan Lenoir. De même, si l’on agrandit le territoire des eucalyptus ou des pins maritimes, deux essences très inflammables, on augmente le risque de départs de feux. (...)

Une chose est sûre : la stratégie à adopter pour adapter nos forêts fait débat, notamment chez les industriels de la filière bois, qui, pour certains, ont déjà recours à la migration massive d’espèces. (...)

De la régénération naturelle à la libre-évolution, il n’y a qu’un pas, que certains n’hésitent plus à franchir. Le meilleur moyen d’obtenir des écosystèmes forestiers diversifiés, caractérisés par l’ensemble de leurs processus écologiques complexes, et résilients, n’est-il pas de leur rendre simplement leur état sauvage ? C’est la cause que défendent un certain nombre de gestionnaires de l’environnement et d’associations naturalistes, au premier rang desquels le botaniste Francis Hallé, qui plaide pour le retour de forêts primaires en Europe. (...)

« Il est illusoire de vouloir mettre en place des stratégies de libre évolution dans toutes les forêts. Mais il est tout à fait possible et souhaitable de sanctuariser des îlots qu’on laisserait évoluer librement. » (...)

planter à marche forcée 1 milliard d’arbres dans les forêts françaises d’ici à 2032, comme l’a promis le président Emmanuel Macron, pourrait causer plus de tort que de bien si cela passe par une politique de coupes à blanc dévastatrices et par l’élimination des vieux arbres. « Ce n’est pas en plantant une armée de jeunes qu’on compense les vieux qui constituent un trésor culturel et écologique sans pareil », conclut Jonathan Lenoir