
Une bataille cruciale est proche de l’épilogue, en région parisienne, dans le débat qui oppose les multinationales de l’eau aux défenseurs de la gestion publique.
Dans la bataille pour la remunicipalisation de la gestion de l’eau, la ville de Bagnolet semble à un point de bascule. Poussée par des collectifs d’usagers, la municipalité a adopté cet été un vœu en faveur de la gestion publique et sortirait ainsi du mode de gestion en délégation de service public (DSP) en cours depuis des années. Opérée par le SEDIF (syndicat des eaux d’Ile-de-France) avec comme délégataire, l’entreprise Veolia, cette gestion est de plus en plus décriée : surcoût, coupure d’eau, opacité financière…
Depuis la réforme territoriale, les communes et communautés d’agglo ont la capacité de renouveler cette compétence au SEDIF ou de revenir à une régie publique comme la ville de Paris. (...)
Le retour à ce mode de gestion est une tendance globale observée dans beaucoup de communes. Le SEDIF, crée en 1923, est une structure sclérosée, totalement verrouillée par la droite : André Santini en est le président depuis 1983 ! C’est un syndicat public, il devrait défendre les usagers, les collectivités, mais il ne le fait pas.
La plupart des gens n’imaginent pas qu’une chose aussi vitale et essentielle que l’eau soit confiée à des entreprises privées, et puis on constate un ras le bol concernant les pratiques de Veolia : surfacturation, coupure d’eau, scandales politico-financiers.
La présidente d’Eau de Paris (opérateur public en charge de la production et de la distribution de l’eau dans Paris, NDLR) est venue rencontrer le conseil municipal de Bagnolet. Nous avons vu qu’ils ont rapidement dégagé des marges de manœuvre financières, avec 12,5 % d’excédent brut, après avoir en plus baissé le prix de l’eau et augmenté les investissements… Dès qu’on se libère de l’emprise des multinationales, on a des marges de manœuvre considérables.
Par ailleurs, l’avis rendu par la chambre régionale des comptes montre que la rémunération du délégataire a explosé, bien au-delà de ce qui était prévu dans le contrat. (...)
Quels sont les blocages qui empêchent pour le moment la ville d’opérer ce retour ?
C’est un combat politique assez difficile, les écologistes et les Insoumis sont d’accords, le maire PS de la ville également, mais cela coince avec les communistes jusqu’à présent. Il y a des intérêts financiers et, de la part des élus communistes, une attitude complètement incompréhensible. Certains pensent que le public n’a pas les compétences ou que si Paris change de majorité, on ne sait pas ce qu’il adviendra de la gestion de l’eau. Peut-être aussi des habitudes des élus qui n’ont pas envie de s’occuper de ces questions. L’argument du manque de compétence technique est compréhensible dans des petites communes, mais pas en région parisienne. On l’a vue à Paris, quand on passe en régie publique, on reprend le personnel en délégation auparavant, c’est obligatoire. Il n’y a donc aucune raison de ne pas y arriver, aucune régie publique ne s’est encore cassée la figure. (...)
La démarche, c’est de faire sortir avant la fin de l’année le plus grand nombre de villes du SEDIF, liés jusqu’en 2022 avec Veolia et profiter de cette période pour construire une gestion publique.
Avec Bagnolet et Montreuil, on aurait une solution pour se fournir en eau à l’usine de Joinville, sans passer par le réseau parisien, mais on se heurte à une partie de la majorité municipale qui ne s’est pas décidée. On essaye de mobiliser la population pour surmonter ces blocages. (...)