
Deux incendies, mardi et mercredi soir, ont ravagé l’insalubre camp de Moria, en Grèce. Des milliers de migrants se retrouvent sans abri, bloqués par les autorités dans une partie de l’île pour éviter la propagation du coronavirus.
Dès mardi soir, l’intérieur du centre d’enregistrement et d’identification, les locaux administratifs et des services d’asile avaient été complètement détruits. « Le peu qui restait du camp est parti en fumée ; plus de 5 500 personnes étaient sans toit mardi soir, et désormais la quasi-totalité des habitants du camp », constate Astrid Castelein, représentante du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) à Lesbos, après deux nuits consécutives de sinistre. Aucune victime n’est à déplorer, mais le camp n’est que tôles froissées et cendres. (...)
« Bye Bye Moria ! », « Moria est mort ! », crient certains migrants, qui ne semblent pas regretter le camp surpeuplé qui hébergeait, au total, près de 12 700 personnes, soit quatre fois sa capacité d’accueil. « Moria était devenue une prison, nous ne pouvions plus sortir, le camp avait été mis en quarantaine depuis quelques jours et ces dernières mesures, très pesantes, ont rendu certaines personnes folles, pleines de rage », commente Oday, un Syrien de 21 ans.
Depuis dix mois, le réfugié d’Idlib attend d’avoir une réponse favorable à son asile : « Plus d’une fois, j’ai perdu la tête, j’étais déprimé… Mais maintenant, cette catastrophe va encore plus retarder l’examen de ma demande et je ne sais pas ce que les autorités grecques nous réservent. Est-ce que nous allons être transférés à Athènes ? Est-ce que nous allons être hébergés dans un nouveau camp ? » (...)
« Des femmes, des enfants, des personnes fragiles sont bloqués par les véhicules de la police et n’ont pas de nourriture, pas d’eau, pas d’informations sur ce qui va se passer dans les jours à venir… » (...)
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Que font les Européens pour aider les réfugiés du camp de Moria et la Grèce ?
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Après les 13 000 chaises devant le siège du Bundestag à Berlin il y a deux jours, à Francfort, 300 personnes ont aussi rassemblées des centaines de chaises pour symboliser le fait qu’il y a de la place pour les réfugiés et que l’Allemagne se doit de les accueillir.
Le ministre allemand des affaires étrangères, Heiko Maas, a offert son soutien à la Grèce et demande à ce qu’une répartition des réfugiés du camp de Moria soit faite dans les pays européens prêts à les accueillir (...)
La Norvège et la France cherchent également des moyens de les aider. (...)
La France est en train de faire le point avec les autorités grecques et n’a donc pas précisé encore quelle aide elle allait apporter.
L’Autriche compte proposer un million d’euros d’aide à la Grèce, mais ne souhaite pas que "le camp de Moria soit vidé car il se remplira de nouveau".
La Commission européenne avait annoncé mercredi soir qu’elle prenait en charge le financement du et le transfert immédiat vers la Grèce continentale de 400 enfants et adolescents.
Face à la désolation du camp de Moria, les réfugiés "abandonnés" à leur sort
(...) Les forces de l’ordre ont formé un cordon de sécurité empêchant les demandeurs d’asile de se rendre vers le port de Mytilène. Les ONG, les bénévoles se font rares, leur accès a été limité, des blocus de forces de l’ordre ayant fermé plusieurs routes.
– "Pourquoi ce manque d’humanité ? -
"Hier, des gaz lacrymogènes ont été tirés par les policiers. Nous avons des enfants, des personnes âgées, des handicapés parmi nous. Pourquoi ce manque d’humanité ?", s’exclame Gaëlle Koukanée, une jeune réfugiée enceinte de quelques mois, qui s’abrite du soleil brûlant à l’ombre d’un olivier.
"Je n’ai pas vu de médecin depuis des semaines. Déjà dans le camp de Moria, la vie n’était pas facile. Nous manquions de toilettes, de douches et nous avions peur, les femmes seules, de nous promener la nuit. Mais maintenant je suis encore plus angoissée qu’avant pour mon avenir", poursuit émue la Congolaise de 21 ans.
Avant d’arriver sur l’île grecque de Lesbos, il y a près d’un an, la jeune femme "rêvait de reprendre des études de littérature et de se reconstruire".
"Je ne sais plus trop si je dois faire des plans maintenant. Si je survis à tout ça, ce sera déjà un miracle", estime Gaëlle. (...)