
...Le plus grand scandale contemporain est sûrement celui de l’indifférence. Tourneboulée par le changement, désorientée par l’accélération des révolutions technologiques, anesthésiée par le ronron des grands médias, l’opinion semble parfois s’être habituée à toute les formes nouvelles d’iniquité. Quant aux intellectuels, nombre d’entre eux ont déserté le terrain social, ainsi abandonné aux nouveaux puissants. Ce sont eux qui ont été déculpabilisés par notre étourderie, pas l’argent. ...
...L’un des pires aspects du nouveau racisme social, c’est donc ce qu’on pourrait appeler son ingénuité. Il se sent en effet légitimé par l’invocation incantatoire de prétendues fatalités que l’on convoque à tout bout de champ : la mondialisation, les contraintes extérieures, les lois du marché, etc… . « On ne peut rien faire » : chacun connaît le refrain. Ces arguments, l’opinion dominante les promeut trop souvent avec une indolente résignation. C’est, au sens strict du terme, un grand retour en arrière, le contraire d’une avancée postmoderne. ...
Au XIXème siècle, il se trouvait des commentateurs très « réalistes » pour justifier le travail des enfants en usine par les prétendues nécessités de la révolution industrielle. Et, déjà, on reprochait à tous ceux qui s’opposaient à ces injustices d’être irréalistes, archaïques, dépassés. Toutes proportions gardées, la capitulation devant les nécessités est aujourd’hui comparable...