
Dans le département des Hauts-de-Seine, de plus en plus de jeunes majeurs étrangers, arrivés mineurs en France, reçoivent des Obligations de quitter le territoire français (OQTF) malgré leur scolarisation et même, souvent, des promesses d’embauche. Les associations dénoncent un acharnement des autorités.
L’heure du déjeuner approche ce samedi 1er juillet et les pelouses du parc de Sceaux sont constellées de nappes de pique-nique. La section des Hauts-de-Seine du Réseau éducation sans frontière (Resf) a profité de cette journée ensoleillée pour convier bénévoles et jeunes étrangers à un grand pique-nique.
Ce moment de "convivialité militante" est le bienvenu car l’ambiance est plutôt morose ces derniers mois. Depuis 2020, les cas de jeunes étrangers majeurs, arrivés mineurs en France, et visés par une Obligation de quitter le territoire français (OQTF) dès leur majorité, explosent. Entre 70 et 80 jeunes sont concernés depuis un an et demi dans ce riche département de l’ouest parisien, selon RESF. Tous sont pourtant protégés d’une expulsion, en théorie : ils ont signé un contrat "jeune majeur" avec l’Aide sociale à l’enfance (ASE), leur permettant de prolonger leur prise en charge par le département jusqu’à leurs 21 ans.
La situation n’a pas toujours été celle-là. "Avant octobre 2020, pour les jeunes de l’ASE, on avait que deux ou trois OQTF par an", se souvient Armelle Gardien, membre de Resf 92.
Malgré la protection supposée des contrats jeunes majeurs, les bénévoles de Resf estiment que l’ASE et la préfecture agissent souvent de concert pour que les jeunes restent dans l’illégalité, et n’obtiennent pas de titre de séjour à leurs 18 ans. Notamment en utilisant la circulaire dite Darmanin, du 21 septembre 2020 sur l’"examen anticipé des demandes de titres de séjour des mineurs étrangers confiés au service départemental de l’Aide sociale à l’enfance".
Le texte donne la possibilité aux préfectures de prendre contact avec un jeune étranger pris en charge par l’ASE dans le but d’établir, avant même sa majorité, son droit au séjour. "Cet examen anticipé doit être présenté au mineur comme une possibilité qui lui est offerte par l’administration et non comme une obligation", précise la circulaire.
"On ne m’a pas laissé ma chance"
Mais, selon Armelle Gardien, les jeunes étrangers de l’ASE subissent "des convocations forcées". "L’ASE a imposé à ces jeunes, avant leurs 18 ans, de faire examiner leur situation en préfecture. Or, ils n’avaient pas, à ce moment-là, les six mois de formation professionnelle qualifiante nécessaire à l’obtention d’un titre de séjour", déplore la militante.
Résultat : malgré des signatures de contrats d’apprentissage, des jeunes se sont vus remettre une OQTF. (...)