
Un changement d’état civil pour les trans pas complètement démédicalisé ni déjudiciarisé, un divorce sans juge au détriment des femmes… les critiques fusent sur les deux mesures dfinitivement adoptées mercredi 12 octobre à l’Assemblée nationale.
C’est fait. Le divorce par consentement mutuel et le changement de sexe à l’état civil pour les personnes trans sont deux mesures définitivement adoptées à l’Assemblée nationale mercredi 12 octobre dans le cadre de la loi sur la Justice du 21ème siècle. Deux mesures présentées comme des avancées, mais en réalité sont loin de faire l’unanimité.
C’est une “journée historique”, estimait l’Inter LBGT concernant la validation du texte de loi permettant désormais aux personnes trans majeures ou mineures émancipées de changer de sexe à l’état civil “sans avoir à subir une intervention médicale”. Car, enfin, le vide juridique qui existait jusque là était comblé. Finis, a priori, les traitements médicaux, stérilisation ou opération chirurgicale, qui conditionnaient jusqu’ici le changement de sexe à l’état civil depuis un avis rendu par la Cour de Cassation en 1992 et faisant jurisprudence.
À quand une procédure “rapide, transparente, fondée sur l’autodétermination” ?
Alors quel est le problème ? “L’Inter LBGT est la voix du gouvernement”, grince Stéphanie Nicot, présidente de la Fédération LBGT. Comme l’Association Nationale Transgenre, elle fustige une loi “très mauvaise et dangereuse. Une des pires au monde”.
D’abord parce que le texte prévoit encore que le changement de sexe à l’état civil soit conditionnée par « une réunion suffisante de faits » démontrant que le sexe du demandeur « ne correspond pas à celui dans lequel il se présente et dans lequel il est connu ». La procédure « reste médicalisée via la demande d’attestations médicales et les critères d’ordre social demeurent flous », estime le Défenseur des Droits. “Comme les critères ne sont pas précis, les preuves à fournir resteront à l’appréciation du juge, selon son idéologie”, précise Stéphanie Nicot.
Ensuite parce que, comme l’incite le Conseil de l’Europe dans sa résolution 2048, les procédures devraient être « rapides, transparentes et accessibles, fondées sur l’autodétermination ». Or, dans la nouvelle loi, les demandeurs seront soumis à la décision d’un juge, dans un tribunal de grande instance. Une procédure longue et coûteuse qui n’a pas satisfait les associations. (...)
Un divorce sans juge, une “responsabilisation des époux”, au détriment des femmes
L’autre mesure polémique, le divorce par consentement mutuel, a également été validée malgré des réticences à gauche et à droite. Le texte prévoit de simplifier le divorce par consentement mutuel, en supprimant l’obligation d’un passage devant le juge. Un moyen, à priori, de désengorger les tribunaux et d’accélérer les procédures aujourd’hui très longues. Une justice « plus accessible », a estimé Jean-Jacques Urvoas, Garde des Sceaux, lors des débats à l’Assemblée. « En ne passant plus devant le juge, les époux attendront moins longtemps et les situations se régleront plus rapidement. Les modes alternatifs de règlement des conflits seront favorisés, avec, par exemple, une conciliation gratuite obligatoire pour les litiges de moins de 4 000 euros ».
Une mesure séduisante de prime abord, mais décriée par nombre d’associations familiales et féministes, par le Défenseur des droits, et même par certains avocats comme maître My-Kim Yang-Paya, avocate à la cour, membre du Conseil de l’Ordre qui publiait une tribune dans nos colonnes. Elle y insistait sur la nécessité de la présence d’un juge pour s’assurer qu’aucun des deux époux ne soit lésé. Car les femmes victimes de violences conjugales « sont souvent prêtes à accepter toutes les concessions que les maris demandent, que ce soit financièrement ou sur l’organisation du droit de visite et d’hébergement des enfants ». (...)