
Les syndicats et le patronat s’apprêtent à renégocier, à la fin 2013, la convention d’assurance-chômage française. Ils devront trouver comment remédier au déficit de l’Unedic, alors qu’il n’y a jamais eu autant de sans-emploi dans le pays. Pendant ce temps, la Suisse, elle, pousse jusqu’à son terme la logique d’activation, c’est-à-dire la politique visant à remettre au travail ceux que l’on soupçonne toujours de fainéantise (...)
Au chômage depuis plus d’un an, Claude, électricien de 50 ans, a demandé à suivre ce que l’on appelle communément en Suisse une « mesure active ». Son conseiller en placement l’a assigné à un « programme d’emploi temporaire » dans une université. Content de pouvoir exercer ses compétences, il commence par affirmer que le prestige de l’institution compense l’absence de salaire pour le travail effectué. Mais l’aura ne résiste pas longtemps au sentiment d’exploitation et à l’impression que ses « collègues » lui réservent le sale boulot : « Ce serait plus valorisant pour moi si je recevais un salaire. Pendant que je suis ici, c’est quand même l’assurance-chômage qui paie, et pourtant, pour le patron qui m’emploie, je suis un ouvrier, une force supplémentaire de travail ! »
Daniela, elle, est arrivée en Suisse à l’âge de 10 ans. Après avoir terminé la scolarité obligatoire sans décrocher de diplôme, elle a travaillé plusieurs années dans une usine. Le jour où celle-ci a fermé, elle s’est retrouvée au chômage. A 23 ans, elle a encore la vie devant elle et nourrit fermement l’espoir de devenir vendeuse. Au moment de notre rencontre, elle a un petit garçon de 2 ans et est enceinte de huit mois. Elle vit un calvaire : « Mon conseiller m’a obligée à faire quelque chose pour que je ne reste pas à la maison. Mais pour moi, ce n’est vraiment pas facile. » Se moquant ouvertement de ses projets professionnels, son conseiller en placement l’a envoyée dans une « entreprise » de tri de déchets électroniques qui fonctionne uniquement avec des sans-emploi. (...)