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Le groupe de Tarnac : « L’antiterrorisme est un mode de gouvernement »
Article mis en ligne le 20 février 2014
dernière modification le 15 février 2014

L’antiterrorisme est magique. Il a non seulement l’art de faire passer des chihuahuas pour des loups, mais en outre celui de faire taire toute protestation à son sujet. Deux lycéens de 15 et 16 ans dont on s’alarmait en janvier, entre compassion et surprise, qu’ils aient pris le chemin de la Syrie sont ainsi devenus à la fin du mois des « apprentis djihadistes » sous contrôle judiciaire. Et nul ne moufte. Deux gamins mis en examen pour « participation à une association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste », deux gamins ramenés de Turquie par des proches et cueillis à leur retour par la direction centrale du renseignement intérieur (DCRI) en guise de comité d’accueil. Tout est dans l’ordre, passons à la suite.

(...)Un enquêteur qui déclare qu’il s’agit en fait de « décourager les autres petits jeunes radicalisés sur Internet qui auraient l’intention de se rendre là-bas », qui déclare donc que l’on inculpe des gens pour intimider les autres, et nul ne s’en émeut. Un ministre de l’intérieur qui multiplie par trois le nombre, déjà gonflé par les services, des Français qui seraient actuellement en Syrie à combattre l’armée de Bachar Al-Assad, et personne pour noter la magouille.

Il faut dire que sans le genre de petites opérations de terreur discursive dont l’antiterrorisme est coutumier, on n’aurait pu si simplement tordre le cou à l’évidence. Ce qu’il y a de sidérant, c’est évidemment que depuis trois ans on laisse un peuple se faire massacrer, bombarder, torturer, gazer par tout un appareil contre-insurrectionnel déchaîné, et non que des jeunes gens trouvent cela intolérable et décident d’agir en conséquence.

C’EST EUX OU NOUS (...)

Nous disions, à peine arrêtés, que l’antiterrorisme ne ciblait pas centralement ceux sur qui il s’abat, mais l’ensemble de la population ; qu’il n’était donc pas une procédure judiciaire, mais un mode de gouvernement.

Depuis lors, les révélations d’Edward Snowden sur les activités de la NSA ont achevé d’en administrer la preuve : c’est au nom de l’antiterrorisme que l’on espionne la totalité de la population, et au nom de l’antiterrorisme que Barack Obama entend rendre cela acceptable.

Comme s’en expliquait le Napoléon III de Maurice Joly dans ses dialogues imaginaires entre Machiavel et Montesquieu, cela ne pose aucun problème puisqu’« il n’y aura que les factieux qui souffriront de ces restrictions ; personne d’autre ne les sentira ». Il suffit pour cela d’organiser l’anesthésie générale, et l’amnésie en temps réel.(...)