Plusieurs ONG et le Bureau humanitaire des Nations unies ont décortiqué les méthodes israéliennes pour pousser les Palestiniens à quitter la partie de Jérusalem sous occupation illégale.
(...) l’Etat hébreu poursuit une politique délibérée de conquête de la ville sainte au détriment de la population palestinienne, dont les formes multiples demeurent méconnues.
« Depuis 1967, les différents gouvernement municipaux aux côtés du Ministère de l’intérieur ont appliqué des politiques qui visent, directement ou indirectement, à maintenir une majorité juive dans la ville. Dans certains cas, ces motivations démographiques ont été exprimées explicitement, dans d’autres, elles ont été rendues évidentes par la pratique », dénonce l’ONG israélienne ICAHD (Israeli Commitee Against House Demolitions), dont le fondateur est lui-même conseiller municipal. Outre un complexe système de permis qui limite ou interdit l’accès à la ville à la plupart des Palestiniens et la construction intensive de colonies à Jérusalem-Est, Israël pratique en effet différentes politiques discriminatoires qui ont pour conséquence de limiter la croissance de la population palestinienne et de la pousser peu à peu au déplacement forcé.
« Israël a pris ces dernières années des mesures afin d’altérer la composition démographique de la partie occupée de Jérusalem, et ce d’une manière irréversible », affirmait déjà en 2011 Richard Falk, rapporteur spécial des Nations Unies sur la situation des droits humains dans les territoires palestiniens occupés. Et l’Etasunien de qualifier « la poursuite de l’expansion des colonies à Jérusalem-Est combinée avec les expulsions forcées de Palestiniens résidents depuis longtemps » de « situation intolérable qui ne peut être décrite, par son impact cumulé, que comme une forme de nettoyage ethnique ».(...)
Même dans les zones prévues à cet effet, il est du reste pratiquement impossible aux Palestiniens de construire légalement, tant les restrictions imposées sont strictes : frais d’obtention d’un permis de construire mirobolants (entre 20 000 et 25 000 dollars), délais de traitement interminables (entre cinq et dix ans), démarches nécessaires à prouver la propriété de la terre onéreuses et très peu de permis octroyés in fine.
Confinés dans des quartiers surpeuplés, ils n’ont alors pour seule option que de partir s’établir en périphérie avec le risque de perdre leur droit de résidence, ou alors de construire illégalement, avec la menace constante de voir leur maison détruite faute du permis adéquat. Selon la CCDPRJ, 40% des habitations à Jérusalem-Est auraient ainsi été construites sans permis et près de 9000 habitations détruites depuis 1967 (2000 selon l’OCHA).
« Alors que des restrictions sont imposées à la croissance de la population palestinienne, la population juive est encouragée et bénéficie du soutien de l’Etat, incluant l’expansion continuelle de quartiers juifs ou de colonies à Jérusalem-Est », dénonce ICAHD. Pour 300 000 Palestiniens, Jérusalem-Est compte en effet déjà 200 000 colons, et les projets de nouvelles constructions ne manquent pas. Une colonisation qui entoure les quartiers arabes et, en plus du mur de séparation, les isole progressivement du reste de la Cisjordanie. « Les mesures israéliennes coupent de plus en plus Jérusalem-Est, le cœur politique, commercial, religieux et culturel palestinien, un centre pour les services médicaux et éducatifs, du reste des territoires occupés », relève ainsi le Bureau des affaires humanitaires de l’ONU (...)
Jérusalem, clé de la paix
« Les lois, les politiques et les pratiques qu’Israël applique aux Palestiniens à Jérusalem violent plusieurs importantes dispositions du droit international. Israël doit y remédier pour remplir ses obligations de pays respectueux des lois et paver le chemin vers une solution pacifique juste et viable au conflit israélo-palestinien », conclut l’ONG israélienne ICAHD. « Jérusalem est au cœur de tous les antagonismes au Moyen-Orient. Le silence international et l’absence de dénonciation de la stratégie israélienne de transfert risquent d’avoir des conséquences irréversibles et de détruire les perspectives régionales de paix. Le transfert des Palestiniens représentera bientôt une réalité incontestée mais ne devrait pas demeurer silencieux », renchérit Elodie Guego.
Toute solution à la question palestinienne ne pourra en effet ignorer le thème de Jérusalem. L’annonce, le 30 octobre dernier par Israël, de la construction de 1500 nouveaux logements à Jérusalem-Est n’a-t-elle pas torpillé des pourparlers qui venaient à peine de débuter ?