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Quelle justice fiscale pour le Sud ? Place de la fiscalité dans les processus régressifs ou émancipateurs
Alternatives Sud : Quelle justice fiscale pour le Sud ? Editions Syllepse, 2019, 172 pages, 13 euros
Article mis en ligne le 4 avril 2019
dernière modification le 1er avril 2019

« L’injustice fiscale a atteint des niveaux record à l’échelle de la planète. Dans les pays du Sud, les conséquences de l’évasion et de la concurrence fiscales se doublent de fiscalités nationales particulièrement régressives. Le constat semble aujourd’hui largement partagé, mais les solutions, elles, continuent de diviser. »

Quelle justice fiscale pour le Sud ? Place de la fiscalité dans les processus régressifs ou émancipateurs

1er avril par Didier Epsztajn
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« L’injustice fiscale a atteint des niveaux record à l’échelle de la planète. Dans les pays du Sud, les conséquences de l’évasion et de la concurrence fiscales se doublent de fiscalités nationales particulièrement régressives. Le constat semble aujourd’hui largement partagé, mais les solutions, elles, continuent de diviser. »

Dans son éditorial, Pour une fiscalité juste… et transformatrice ?
publié avec l’aimable autorisation des Editions Syllepse, Cédric Leterme aborde, entre autres, la baisse des impôts pour les riches et les entreprises, l’évasion et l’optimisation fiscale, les paradis fiscaux, le positionnement néolibéral qui considère que l’« impôt comme injuste et inefficace », le mythe du ruissellement, la concentration des richesses et des patrimoines…

L’auteur détaille la « Double injustice pour le Sud », l’évasion fiscale, les besoins d’investissements, « les pays en développement voient s’échapper chaque année vers les paradis fiscaux l’équivalent de trois à seize fois ce qu’ils reçoivent en aide au développement ou en investissements directs étrangers », les fiscalités nationales régressives, le faible poids des impôts en termes de pourcentage du PIB, la structure des impôts avec la prépondérance des impôts indirects, la sous-utilisation des impôts au potentiel plus redistributif, les avantages et les cadeaux fiscaux aux entreprises et aux investisseurs étrangers…

Cédric Leterme fournit des explications, tant internes qu’externes, aux différents pays ; indique des « avancées symboliques enregistrées dans la lutte contre l’injustice fiscale, dont témoigne notamment la fréquence avec laquelle le sujet s’invite dans les médias et les grandes rencontres internationales » et trace des perspectives « Pour un ordre fiscal mondial plus juste ». (...)

Les normes fiscales prônées par l’OCDE ou le FMI ont été élaborées, hors de l’avis et des intérêts des Etats du Sud global, sans prise en compte des rapports de pouvoir (il faut souligner qu’il en est de même pour les règles fiscales dans les Etats du Nord global). (...)

Les réformes mises en place « ont contribué à réduire significativement la capacité de l’Etat à accroire et à mobiliser ses recettes publiques, avec comme horizon la réalisation des droits humains ». Il faut en effet étudier le déficit provoqué par l’absence de recettes et les effets sur les possibles dépenses.

J’ai notamment été intéressé par les travaux du Réseau pour la justice fiscale en Amérique latine (terminologie invisibilisant les amériques indiennes, afro-américaines, etc.), son agenda de lutte reposant sur quatre piliers : un contrôle fiscal des multinationales, un cadastre des bénéficiaires finaux des profits, l’échange automatique d’informations, un combat contre l’opacité fiscale mondiale.

Règle de progressivité de l’imposition, fin des privilèges fiscaux à l’investissement, agenda pour la justice fiscale, visages de la fraude, monde offshore et ses outils servant « à cacher, évader, fuir et blanchir », situation des « non-résidents », opacité du réseau mondial des services financiers, dollarisation des excédents, flux financiers illicites.

Une partie de la revue est consacrée aux effets genrés des politiques fiscales, tant du coté des recettes que des dépenses, les effets sociaux inéquitables de la TVA, les effets du désengagent des Etats sur la santé des femmes ou sur la lutte contre les violences, le genre des politiques et leurs effets discriminatoires, les études d’impact et leur cécité au genre, « Il y a lieu de tenir compte des biais de genre explicites et implicites qui amènent les femmes à contribuer davantage à l’impôt que les hommes », le fantasme de négociations entre partenaires égaux au sein des familles, les taxes sur la consommation qui pèsent particulièrement sur les femmes, les coûts sexués des pratiques fiscales, les effets de la dette et du sous-investissement, les activités criminelles dont la traite des êtres humains…

La dernière partie est consacré à des discussions autour de la fiscalité écologique (...)

Quoiqu’il en soit, les travaux sur une autre fiscalité se développent. Celle-ci doit faire l’objet de débats publics, débats politiques et non « techniques ». Les différents choix devront être soumis aux décisions démocratiques afin que les citoyen·es puissent en être à la fois partie prenante et partie décidante. Ni les asymétries entre pays, ni les différentiels de « développement » et de « besoins », ni les rapports de pouvoir – dont le système de genre – ne peuvent être écartés au nom d’une équité qui est bien le nom néolibéral des inégalités.