
Après avoir fait couler beaucoup d’encre en 2015 lors de l’adoption de la loi renseignement, ces sondes dédiées à la surveillance en temps réel des communications Internet de millions de résidents français sont désormais employées légalement par les services dans le but de repérer certaines communications « suspectes ». C’est ce qu’a annoncé Francis Delon, le président de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR) lors d’un colloque mardi 14 novembre à Grenoble.
Sauf que cette annonce est l’arbre qui cache la forêt. On nous explique que le « contenu » des communications n’est pas concerné, et que le secret des correspondances est donc sauf. Mais lorsqu’on lit entre les lignes de la loi et que l’on suit les quelques journalistes d’investigation qui planchent sur le sujet, il est clair que le droit français cherche depuis 2013 à légaliser l’usage des techniques de « Deep Packet Inspection », lesquelles constituent en fait le point d’articulation entre différentes logiques du renseignement technique contemporain.
Jusqu’à présent, chez les défenseurs des libertés publiques intéressés par le renseignement – militants, juristes, universitaires, etc. –, nous étions nombreux à suspecter le recours à de telles techniques de surveillance sans comprendre précisément comment elles pouvaient s’inscrire dans le cadre juridique. En réalité, certaines ambiguïtés légistiques faisaient obstacle à la compréhension de l’articulation droit/technique, faute de transparence sur la nature des outils techniques utilisés par les services et leurs usages.
Or, compte tenu des informations révélées par Reflets.info et Mediapart l’an dernier sur des sondes DPI installées dès 2009 chez les grands fournisseurs d’accès français, on peut raisonnablement penser que les « boîtes noires » sont en réalité déjà expérimentées depuis longtemps. (...)