
L’ONG Greenpeace milite pour l’arrêt des rejets de substances radioactives en provenance du site de retraitement de la Hague, au large du Cotentin.
La fosse des Casquets, la poubelle nucléaire
Entre 1946 et 1993, quatorze pays ont ainsi procédé à des immersions de déchets radioactifs dans plus de 80 sites situés dans les océans Pacifique, Atlantique et Arctique. La moitié de ces immersions a été effectuée dans la zone Atlantique Nord-Est. Notamment au large des côtes françaises. (...)
En 1993, une convention internationale a finalement été signée pour interdire définitivement cette pratique.
Un système de prélèvements et d’analyses douteux
Cela a-t-il découragé l’industrie nucléaire de continuer à rejeter ses déchets en mer ? Non. D’autres moyens ont été trouvés. De la Hague, un pipeline long de 4 km s’enfonce à une soixantaine de mètres sous la mer pour déverser, en toute légalité, un cocktail de matière radioactive : tritium, césium, strontium, et même uranium et plutonium. Avec un volume de radioactivité équivalent chaque année à deux fois et demie les émissions de l’ensemble des déchets reposant au fond des Casquets. (...)
les prélèvements et analyses sont réalisés en interne, avant d’être envoyés à l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN). Un peu comme si c’était l’automobiliste qui envoyait ses relevés de vitesse à la gendarmerie. Or c’est ce système de surveillance, basé sur la confiance, et sans véritable contrôle extérieur, qui a permis le scandale des dossiers falsifiés par Areva à sa forge du Creusot (Saône-et-Loire) pendant près d’un demi-siècle.
Quant aux fûts eux-mêmes, Greenpeace a envoyé en 2000 un drone sous-marin pour les filmer. Ce dernier en a rapporté des images édifiantes. (...)
Que peut-on faire ? Pas grand-chose malheureusement. « Le niveau de dégradation des fûts est tel qu’il est compliqué, voire dangereux, de les bouger du fond de la mer », déplore Yannick Rousselet. (...)
« Le Cotentin concentre ce que l’industrie nucléaire a fait de pire, assène Yannick Rousselet, chargé de mission nucléaire à Greenpeace. Implanter un centre de stockage et une usine de retraitement sur un marais ; construire un réacteur nucléaire qui cumule les malfaçons ; et surtout se débarrasser des déchets directement… dans la mer ! » (...)
Le choix du Cotentin n’est pas anodin. C’est en effet l’un des endroits les plus nucléarisés du monde. Entre la Centrale de Flamanville (deux réacteurs en fonctionnement, plus l ’EPR en cours de construction ), le Centre de stockage de la Manche (CSM), l’usine de retraitement de la Hague et les sous-marins nucléaires à Cherbourg, l’atome y est roi.
Sorti du port de Cherbourg dès potron-minet pour s’aider de la marée, tant les courants sont puissants, le voilier à deux mâts et cinq voiles a effectué une sorte d’« atomic tour » devant les principaux sites. À chaque étape, des banderoles sont déployées : « Pollution nucléaire » ou encore « Déchets nucléaires, ça déborde ». (...)
Terre, air ou mer, Greenpeace se déploie sur tous les terrains pour alerter l’opinion sur le nucléaire et à ses conséquences. Vendredi, c’est au large du Cotentin (Manche) que l’ONG avait choisi de monter une opération à bord du Rainbow Warrior III.