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En 2024, 16 000 étrangers sont passés en centres de rétention, dont une majorité de Maghrébins, selon un rapport de La Cimade
#CRA #migrants #immigration #Cimade
Article mis en ligne le 30 avril 2025

Selon le dernier rapport de La Cimade, en 2024, la France a recouru massivement aux placements en centres de rétention (CRA) pour tenter d’éloigner les étrangers en situation irrégulière. Parmi eux, une majorité d’Algériens, de Tunisiens et de Marocains. Une méthode inefficace juge la Cimade : 60 % des personnes en CRA finissent par être libérées.

C’est un nouveau rapport très critique envers le gouvernement français. Dans son bilan annuel, publié mardi 29 avril, La Cimade dresse un tableau acerbe "des pratiques abusives et des violations des droits des personnes enfermées" en centres de rétention français en 2024. Des privations de liberté "inutiles", juge l’association de défense des droits des étrangers dès les premières pages du rapport.

Non seulement les expulsions au terme de cet enfermement restent faibles mais surtout le placement en rétention "augmente les tensions entre les personnes retenues, ainsi que leur angoisse et leur détresse, notamment concernant les personnes particulièrement vulnérables, souffrant de maladies graves ou de troubles psychiatriques".

Au total, 16 228 personnes ont été enfermées dans ces lieux de privation de liberté en France hexagonale, un chiffre peu ou proue similaire à celui de 2023. (...)

Ce nombre grimpe à 40 000 si l’on inclut les étrangers enfermés en CRA à Mayotte (22 300 en 2024) et dans les Outre-mer (Guadeloupe, Réunion, Guyane…) (...)

En ce qui concerne l’Hexagone, La Cimade rappelle que l’écrasante majorité des retenus sont maghrébins, ils constituent le trio de tête des nationalités (...)

Pourtant, selon le droit français - et européen - l’enfermement d’un étranger en CRA est une mesure qui ne doit être utilisée qu’en dernier recours, "dans les cas où l’administration n’a pas d’autres moyens moins attentatoires aux libertés pour réaliser l’expulsion", rappelle l’association. Dans les faits, donc, il n’en est rien. L’immense majorité des retenus en France ont été placés en rétention suite à la réception d’une OQTF (Obligation de quitter le territoire français) non respectée. Un peu plus de 128 000 ont été émises l’année dernière, seules 11 % ont été exécutées. (...)

La Cimade rappelle aussi que la majorité des étrangers en centre de rétention ne sont pas des délinquants - 28 % sont emmenés en CRA à leur sortie de prison. Les autres n’ont commis aucun crime sur le sol français. Ils sont sans-papiers. Mais être en situation irrégulière n’est pas un délit en France mais une irrégularité administrative.

Une frontière sémantique de plus en plus floue, dénonce La Cimade. Les autorités brandissent de plus en plus "la menace à l’ordre public" pour justifier des placements en rétention. Cette mesure "participe [...] à troubler la perception des situations dans l’opinion publique, en martelant l’assimilation entre ’personnes étrangères’ et ’délinquance’". (...)

"La notion de ’menace à l’ordre public’ a aussi fortement influencé les décisions des juges judiciaires, qui se sont saisis de ce critère (apprécié très largement) pour accorder à la préfecture la prolongation de la rétention", écrit La Cimade. "Ces situations sont révélatrices d’une volonté politique de stigmatiser toujours plus les personnes étrangères".
3 000 places en rétention d’ici 2027

Pourtant, le gouvernement ne semble pas amorcer de virage moins répressif. En 2023, Gérald Darmanin, alors ministre de l’Intérieur, avait annoncé à l’époque vouloir augmenter les places en CRA (...)

En 2024, la durée moyenne de rétention s’établissait à près de 33 jours, soit 5 jours de plus par rapport à 2023. (...)

Le 18 mars 2025, le Sénat a adopté en première lecture cette proposition de loi.

Autant de mesures politiques raillées par la Cimade : "La multiplication des locaux de rétention administrative, n’est pensé qu’à l’aune de la chimère selon laquelle enfermer plus permettrait d’éloigner plus". Il n’en est rien. (...)

Un manque d’efficacité déjà souligné par la Cour des comptes l’année dernière. Cette dernière recommandait de miser davantage sur les "retours volontaires". Ils sont moins coûteux qu’un éloignement forcé, rappelait Pierre Moscovici, le premier président de la Cour.

Pour rappel, il est juridiquement contraignant d’expulser un étranger : certains sont inexpulsables (comme les Afghans, par exemple), d’autres, qui n’ont plus de documents d’identité, ne sont pas reconnus par leur pays d’origine (notamment par les pays du Maghreb) - et les États en question ne délivrent pas de laissez-passer consulaires.

Trois familles enfermées en CRA en 2024

La Cimade insiste enfin sur la présence des mineurs en CRA. La loi asile et immigration du 26 janvier 2024 a acté la fin de l’enfermement des enfants dans les centres de rétention administrative. (...)

Cette interdiction du placement des enfants en rétention ne s’appliquera à Mayotte qu’à partir du 1er janvier 2027. "Ce décalage dans le temps vide de son sens la mesure puisque c’est dans ce territoire ultramarin que la majorité des familles avec enfants sont enfermées ; en moyenne ce sont 40 fois plus d’enfants qui y sont privés de liberté par rapport au reste des centres de rétention", écrit La Cimade.

Au total, la France a été condamnée à onze reprises par la CEDH pour l’enfermement d’enfants en centre de rétention.