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Mediapart
« La COP biodiversité n’a pas eu l’attention politique et médiatique qu’elle mérite »
#COP16 #ecosystemes #biodiversite #urgenceclimatique
Article mis en ligne le 4 novembre 2024

Après deux semaines de négociations, la COP16 doit se clore ce week-end à Cali, en Colombie. Malgré un accord historique adopté en 2022, le bilan est peu réjouissant pour les associations, car tous les pays sont loin de respecter leurs objectifs nationaux de protection de la biodiversité.

La 16e conférence mondiale sur la biodiversité (COP16) s’est ouverte le 21 octobre à Cali, en Colombie, sous le signe de l’urgence d’enrayer l’effondrement du vivant, au regard du nombre d’espèces en voie de disparition et du déclin des écosystèmes.

À Montréal (Canada), en décembre 2022, la COP15 avait abouti à un accord historique : le cadre mondial pour la biodiversité (CMB) de Kunming-Montréal. Cette feuille de route liste quatre grandes missions pour 2050 et vingt-trois objectifs biodiversité à réaliser à l’horizon 2030. Parmi ses prérogatives : la protection de 30 % des terres et des mers sur le globe, et la restauration de 30 % des écosystèmes dégradés.

Les 196 États signataires de l’accord ont aussi décidé de financer la préservation de la biodiversité en mobilisant 20 milliards de dollars par an d’ici 2025 et 30 milliards par an d’ici 2030.

Cette année, les pays devaient présenter un plan complet d’action pour respecter ces engagements. Pourtant, sur les 196 États participants, une trentaine seulement ont dévoilé une stratégie nationale biodiversité prenant en compte pleinement le CMB de Kunming-Montréal.

Après deux semaines de négociations, Marine Pouget, responsable de la gouvernance internationale sur le climat pour l’ONG Réseau action climat, dresse pour Mediapart un bilan – plutôt décevant – de cette seizième réunion internationale pour la biodiversité. (...)

Cette année, les pays devaient présenter un plan complet d’action pour respecter ces engagements. Pourtant, sur les 196 États participants, une trentaine seulement ont dévoilé une stratégie nationale biodiversité prenant en compte pleinement le CMB de Kunming-Montréal.

Après deux semaines de négociations, Marine Pouget, responsable de la gouvernance internationale sur le climat pour l’ONG Réseau action climat, dresse pour Mediapart un bilan – plutôt décevant – de cette seizième réunion internationale pour la biodiversité. (...)

Marine Pouget : Il y avait trois enjeux : le premier, c’est l’ambition. (...)

Aujourd’hui, on est très déçus parce qu’une trentaine de pays seulement, dont la France, ont mis à jour leur stratégie, alors qu’il y a quand même 196 signataires.

Le deuxième enjeu, c’est celui de la finance. (...)

Les pays en développement demandent depuis trente ans, sans succès, un fonds dédié à la biodiversité (...)

Le troisième enjeu, c’est d’assurer la bonne participation des peuples autochtones dans les pourparlers autour de la biodiversité. De manière générale, les peuples autochtones sont beaucoup mieux pris en compte dans la sphère biodiversité que dans la sphère climat. (...)

107 pays ont soumis des engagements biodiversité partiels, ne prenant pas en compte l’accord de Kunming-Montréal. Y aura-t-il des conséquences pour ces pays ?

Aucune. Dans le cadre des COP, l’ONU n’est pas un organe qui peut sanctionner des pays, car il n’a pas le mandat pour le faire. Mais quand on ne vient pas avec des stratégies mises à jour, on a un poids politique beaucoup moins important dans les négociations, parce qu’on n’est pas pris au sérieux. Donc il y a quand même un impact en termes de renommée. Par exemple, si on veut bénéficier de fonds financiers pour la biodiversité mais que l’on n’a pas de stratégie mise à jour, on va être dépriorisé.

Par contre, il peut y avoir des conséquences au niveau national. C’est ce qu’il s’est passé en France sur la question climatique, avec l’initiative L’Affaire du siècle, qui a conduit à ce que la justice somme le gouvernement français d’agir pour le climat. (...)

Si l’État ne respecte pas la loi, ce qui est le cas quand il ne met pas en place les objectifs qu’il a signés, on peut porter le coup juridiquement. (...)

la COP biodiversité n’a pas eu l’attention politique et médiatique qu’elle mérite. Les États se sont vraiment focalisés sur le climat au début, parce que les sciences climatiques étaient beaucoup plus avancée que les autres. Aussi, quand on parle de désertification ou de dégradation de la biodiversité, les impacts sont moins visibles que ceux concernant le climat, alors qu’ils sont pourtant tout aussi importants. (...)

Pis, les ministres ne s’y rendent pas forcément, contrairement aux COP climat, où tous se déplacent. Mais techniquement, elles ont les mêmes mandats, elles ont la même importance, elles ont les mêmes objectifs de protection de notre planète (...)

Les délégations du Sud ont été extrêmement pénalisées, parce qu’elles n’ont pas autant de monde que les délégations des pays industrialisés. On le voit sur la question des peuples autochtones : il y a beaucoup de délégations qui n’ont pas envoyé de représentants ou de représentantes parce qu’elles n’ont pas les moyens matériels. Ça n’aide pas aux négociations.

Lors des débats, il y a aussi les observateurs, c’est-à-dire ceux qui représentent la société : des entreprises, des associations, des syndicats. Ces types d’acteurs n’ont pas le droit de parler ou de négocier parce qu’ils n’ont pas de mandat.

Par contre, on a le droit d’écouter les pourparlers et ensuite d’aller parler aux négociateurs pour appuyer leur propos, leur donner plus de données, de l’expertise, ou faire remonter un message. (...)

Le bilan est assez décevant. (...)

tant qu’il n’y a pas la finance à la hauteur, on n’y arrivera pas.

Et sur la question des peuples autochtones, il y a eu un très gros blocage de certains pays. (...)

Un texte qui propose la création d’un organe représentatif pour ces peuples est quasiment finalisé et signé par tous les pays présents. Je ne veux pas crier victoire trop vite, mais il y a des chances qu’à la prochaine COP biodiversité, on puisse avoir des négociations diplomatiques beaucoup plus inclusives.