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Rue 89 Strasbourg
Sarah, mère célibataire au RSA : « 15 heures de bénévolat, c’est impossible »
#RSA #stigmatisation
Article mis en ligne le 6 octobre 2023
dernière modification le 5 octobre 2023

L’Assemblée nationale a créé jeudi 28 septembre un « contrat d’engagement » pour contraindre les bénéficiaires du RSA à 15 heures de bénévolat par semaine. En Alsace, un dispositif similaire existe depuis 2016 mais il est peu appliqué parce que les conditions de vie des allocataires ne le permettent souvent pas.

(...) Ça se voit qu’ils n’ont aucune idée de ce qu’il se passe, nous on se bat pour survivre », lance Sarah. Cette « maman célibataire » de 25 ans est bénéficiaire du revenu de solidarité active (RSA). Elle est excédée par la volonté d’ajouter des contraintes aux personnes qui touchent les minima sociaux.

Ce souhait d’assortir le RSA à des obligations est depuis quelques années une obsession du parti Les Républicains (LR). Nicolas Sarkozy défendait le principe dès 2015, au nom d’une prétendue lutte contre « l’assistanat ». Et la droite alsacienne s’est particulièrement illustrée en la matière. En 2016, Éric Straumann (LR), alors président du département du Haut-Rhin, a tenté d’imposer sept heures de bénévolat hebdomadaires aux allocataires haut-rhinois du RSA. (...)

Saisi par la préfecture dans la foulée, le tribunal administratif de Strasbourg a jugé que le Département ne pouvait pas imposer une activité non rétribuée en échange d’une allocation. Le dispositif d’Éric Straumann existe toujours en 2023, mais n’est pas obligatoire. Il a été étendu à toute la Collectivité d’Alsace (CeA) avec la fusion du Bas-Rhin et du Haut-Rhin en janvier 2021.

Contactée par Rue89 Strasbourg, la CeA indique que sur les 39 700 bénéficiaires du RSA en Alsace, chaque année, « entre 400 et 500 personnes sont en situation effective de bénévolat » : (...)

Interrogé par France Bleu Alsace, Éric Straumann, désormais maire de Colmar, juge ce système « relativement inefficace », sept ans après sa création. (...)

Selon un rapport de la Cour des comptes de novembre 2021, en Alsace, 54% des bénéficiaires du RSA sont des femmes. 25% des allocataires sont célibataires avec des enfants, et 25% sont en couple avec des enfants. 17% ont plus de 50 ans.

Pour Sarah, les bénéficiaires du RSA ne sont pas des personnes « fainéantes » qui doivent simplement être secouées pour s’insérer professionnellement. (...)

Même la CeA reconnait que les freins à la participation au bénévolat « sont les mêmes que ceux de l’accès à l’emploi ». Ces freins que connaissent donc, justement, les bénéficiaires du RSA : « Les problématiques de santé, de mobilité, de logement, de pratique de la langue… »

L’article de loi sur le RSA voté par les députés jeudi 28 septembre prévoit la possibilité de ne pas réaliser ces heures de bénévolat, pour les personnes qui « ont des problèmes de santé, ou un handicap » ainsi que « les parents isolés sans solution de garde d’enfants ».

Sarah vit avec 870 euros de RSA et d’Allocation logement. Elle a résilié ses abonnements internet, Netflix, Deezer et elle ne va plus à la salle de sport. La jeune femme a été obligée de se rendre aux Restos du cœur plusieurs fois et d’utiliser des chèques services pour faire ses courses. « Ils croient que ça me plait ? », interroge-t-elle, à l’adresse de « ceux qui critiquent » les bénéficiaires du RSA : « Personne ne peut se satisfaire d’une telle situation. »

Au micro de France 3 Aquitaine, Xavier Fortinon, président socialiste du conseil départemental des Landes, a estimé que cette obligation de bénévolat ne fait que « stigmatiser un peu plus » des personnes précaires (...)

Marc Desplats, président de l’association de défense des droits des chômeurs ABCDE, considère que le RSA est un droit qui ne permet d’ailleurs même plus d’avoir l’essentiel, un loyer et à manger. En revanche, il ne doit « être assorti d’aucune obligation » (...)

Pour Jean-Luc Gleyze, président socialiste du conseil départemental de la Gironde, « considérer le RSA et l’insertion uniquement sous l’angle de la sanction, c’est méconnaître la réalité et la complexité des parcours de vie ». Au contraire, il rappelle que des présidents de départements de gauche proposent depuis 2018 de mettre en place un revenu universel, afin de « prendre en compte la spécificité de chacun et de l’amener à une insertion sociale et professionnelle émancipatrice et épanouissante ». (...)

« Il y a la volonté de contrôler davantage les chômeurs » (...)